« Morituri » le prochain opus de MURATne sera disponible que le 15 avril 2016. Mais déjà « French lynx » le 1er single de l’album rugit et fait parler de lui … « FRENCH LYNX » c’est qui ??? C’est l’Auvergnat : Jean-Louis BERGHEAUD dit MURAT … pour les« Dames »… mais aussi pour les « Messieurs »…
Et oui, le « lynx » c’est lui : MURATdépenaillé, en guenilles, sans pantalon. Cela fait des lustres que MURATnous répète, seul dans le désert, que bien des choses vont mal dans le pays. Le Français se perd. Les valeurs essentielles ne sont plus respectées. Ses paroles sont celles d’un : « bon père de famille« .Cela lui vaut, lui a valu, bien des railleries. C’est quoi ce chanteur qui veut vendre des disques, et qui nous tient un discours que certains disent « réactionnaire », alors qu’il n’est que de bon sens ? Oui MURAT« sans culotte »c’est la France où tout va à veau l’eau. Les apparences sont trompeuses. La mine est encore fière. Les ray ban font leur effet … mais les bases sont chancelantes ! Le discours de nos politiques n’a plus de prises, pourtant il se veut encore optimiste. Mais les Français ne sont plus dupes. Ils ne veulent plus de ces hommes qui ne sont que des menteurs pour la plupart, qui ne pensent qu’à eux. Et oui, ce MURAT défroqué, c’est la France qui est à poil ! Notre langue y compris est en danger puisque, triste sort … morne « pleine » … la voilà abandonnée aux : « ANAL FA BÊTES ».N’en jetez plus … la coupe est « plaine »… D’ici, j’entends le lynx d’Orcival qui sort de ses gonds, qui rugit, qui gémit …
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Extrait de « French lynx »
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« Tu rumines au sextant
Tu te crois indigène
Mais tout est éboulis«
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« Au temps que tout emporte
Rien ne tient le contre courant »
(…)
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Les mots de MURAT disent tout … Ils révèlent nos maux … .
Les paroles de cette chanson sont belles et cruelles. Dès la première strophe MURAT nous livre son portrait tout craché …
« Vite tu penses une chose
Tu penses son contraire
Tu passes ton temps à faire
Encore plus à défaire ».
(…)
Le constat qui suit me donne froid dans le dos. Chez MURAT aucune concession, point de faux semblant, de sourires hypocrites, de niaiseries abêtissantes pour mettre un peu de baume au cœur du consommateur éventuel que nous sommes … Le couperet tombe, les mots vous glacent, MURAT fait face …
(…)
Tu sens comme tout de toi
Ne prend plus la lumière
Tu sens comme tout de toi
Glisse sans fin vers la rivière
Dans la vie d’ici ».
(…)
Cette chanson ne fera jamais un tube. Mais les paroles sont divinement superbes. Vous allez dire que je suis mauvais juge, j’ai plaisir à lire RIMBAUD, VERLAINE et APOLLINAIRE. Un jour viendra où l’on reconnaîtra les mérites de MURAT … Vous pouvez rire de moi … que m’importe !
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« Pias » semble avoir mes les petits plats dans les grands pour la sortie du nouvel opus de MURAT. Dans le cadre de la promo la maison de disques a édité 4 fiches cartonnées (format 12 x 25) comportant l’intégrale des 11 textes de l’album. J’aime l’écriture de MURAT et vous le savez bien, plus encore que ses chansons. C’est peut-être péché que de le dire mais c’est ainsi. Ce matin j’ai donc pu lire tous les titres du nouvel album. Certains sont sublimes. C’est à en pleurer. « Le chant du coucou » est remarquable ! C’est simple, c’est beau ! Qu’il est bien de pouvoir goûter ces textes avant la sortie de l’album, le plaisir de lire et relire n’en est que plus fort.
A la campagne, il y a cinquante ans, que ce soit en Auvergne ou en Bretagne, il y a une chose dont on ne parle jamais, qu’on fait souvent (du moins je l’espère) c’est : « ça ».On le fait comment ? Eh bien : « comme ça ! ». C’est quoi ? C’est : « la chose ». Dans le texte du titre « Morituri » femme ose dire : « Ne fais pas comme ça »puis de se résigner et finir par lâcher : « Ca ne me va pas/Si la chose te va ».Ces « choses » là, il ne faut pas qu’elles se sachent. Le faire comme ça, devient une habitude : « La manie est prise« , femme consent et s’incline : « Si la chose te va ».MURATécrit : « Nue sous la remise/On fait ça comme ça« . Plus en amont il précise : « Pour éclaircir ma voix/Non ne le dis pas ». Et vous pensez à quoi ? A la même chose que vous bien évidemment !
Dans « Morituri » c’est une femme qui parle. Avec gouaille elle s’exclame : « Le sang a séché » (…) « Pauvre con à moi ».Son amant, mari ou pas n’est pas toujours habile, elle murmure : « Faisons ça fissa ». D’autres fois elle est plus admirative et concède : « Comme tu y vas ! ».
A la campagne on n’est pas des « diseux », on est des « taiseux » des « faiseux » des « baiseux » aussi. Cela ne se dit pas. Le plus souvent, pour ne pas dire toujours, c’est l’homme qui décide. Madame n’est pas disposée ? Qu’importe ! C’est comme ça. Monsieur a des envies, monsieur les assouvit. Après ça, une bonne rincette. Il ne restera à Madame qu’à faire une petite toilette et reprendre le rythme d’une journée de travail, commencée tôt avec la traite des vaches, qui se finira tard avec les préparatifs pour le lendemain. A la campagne, ce sont les animaux, le taureau, le cheval, le chien ou le chat qui vous apprennent tout. Ces compagnons de vos journées vous enseignent en premier lieu : comment faire des bébés. Les parents n’ont pas de temps à discourir avec les enfants. A la campagne, en ce temps là, s’adonner à « la galipette » est le seul loisir qui s’offre à vous. Cela se fait loin des regards. Cela se fait vite, il n’y a pas de temps à perdre. Il y a les vaches à traire et le blé à rentrer. L’orage gronde …
Et la fameuse « Cathy » souvenir des « paradis perdus »: « Oh Cathy aime moi » ??? Non. MURAT en interview dit qu’il aime a se faire appeler comme ça. « Cathy » ? C’est lui !
« Morituri » désigne ceux qui vont mourir. La soixantaine passée la soif de vouloir satisfaire « Madame » n’est sans doute plus aussi forte, irrépressible. Qu’il est loin le temps du fier amant qu’on avait peine à rassasier : « L’amour est parti/C’est toi qui l’a dit ». Alors « Morituri » le chant du cygne du « zizi » ???
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Ajout le 25 février 2016 …
On nous dit MURAT reclus dans son pays d’Orcival. Surprise, le nouvel album qui s’annonce nous mène largement voir ailleurs. Son ancrage en Auvergne est toujours aussi prégnant, pour autant il n’est pas de chansons qui ne nous conduise hors des sentiers battus, loin de sa terre Auvergnate …
MURAT nous invite à un beau tour du monde, voyez plutôt …
Extrait du titre « Tous mourus »
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« Comme dit le gars de BAGNOLS/Le paysan est mouru »
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Bagnols est une localité du Puy de Dôme comprenant 720 habitants environ et située à 850 mètres d’altitude …
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« Le garde-chasse s’est pendu vers CHAMBOURGUET«
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Sur le Puy Chambourguet les marmottes ont fait leur royaume …
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« J’irai voir la mer, voir les Pyrénées«
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Question d’oublier, tous ces morts, tous ces pendus …
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Extrait « Le chant du coucou »
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« Un vent d’Espagne me ramenait le passé »
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« Je prenais vers FONSALADE/Pour tremper mes mains dans l’eau ».
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« Fonsalade » est la vallée ou vallon qui sépare les roches « Tuilière » et « Sanadoire », creusé par un glacier . En patois le terme veut dire « Fontaine salée ». C’est aussi le nom d’une rivière où, chemin faisant, il est bon de se rafraîchir les pieds.
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Extrait « Le cafard »
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« En Haute Savoie/Face caméra/Coupez »
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Village Haut Savoyard sous la neige …
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« J’ai quitté Angers/J’ai préféré fuir »
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Le château du roi René y sied …
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« J’ai quitté ROISSY/Pour sauver ma vie »
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Comme on le comprend …
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« Je suis en Bretagne/Je reprends haleine »
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Escale dans la cité des corsaires …
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« Ile de Bréhat/Face caméra/Coupez »
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Ici l’air est sain …
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Extrait de « Tarn et Garonne »
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« Quand Emilie vient me voir/Elle quitte sa Tour Eiffel
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La « Belle Dame » vue par Christophe PIE … himself !
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« Quand Emilie vient me voir dans le Tarn et Garonne«
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Les gorges de l’Aveyron dans le Tarn et Garonne …
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Extrait de « French lynx »
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« Le cœur est le cerveau/Petit talus de Lorraine »
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Image de Temple Neuf en Lorraine …
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Extrait de « Frankie »
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« J’ai suivi la femelle/En forêt de Bavière«
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Nous quittons la France, direction outre Rhin …
Même les loups y trouvent leur place …
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Extrait de « Nuit sur l’Himalaya ».
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« Comment va la nuit sur l’Himalaya ? ».
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L’Himalaya chanté par MURAT est un sommet d’amour …
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Extrait de « La pharmacienne d’Yvetot »
Un détour par « CHARLANNE« …
Le plateau de « CHARLANNE » surplombe LA BOURBOULE. En 1902 Jean CLARET constructeur du 1er tramway électrique Français à Clermont-Ferrand conçoit un funiculaire pour accéder au plateau. Un restaurant voit le jour ainsi qu’un mini golf. L’un et l’autre ont été abandonnés. le site est redevenu naturel.
Puis MURAT nous conduit autour du monde tour à tour : « Les Açores » – « Le Danemark » - »Tahiti » – « Monaco » – « Cordoba » - « ARKHANGELSK » … Et MURAT de citer ces endroits où la paix du monde s’en est allée, a vacillé : « DANTZIG » – « Les Dardanelles » « SARAJEVO » – « Le Bengale » et « Le Bengladesh » … Enfin MURAT de faire référence à : « La Corée du Nord » … Mais toujours la jeunesse et l’amour l’emportent … retour à : « Yvetot » …
Un air de Normandie …
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Extrait de « Tous Mourus »
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« V’là que le paysan s’est noyé/A ce qu’on dit
Dans le purin/Qu’il devait épandre au Veillis« .
(…)
Mais inlassablement sur ses terres le chevalier MURAT revient … Il est né paysan, doublé d’un BERGHEAUD … « Tête dure/tête de mort » …
En effet, « Le Veillis » n’est rien moins qu’une parcelle de terre cultivée par Françoisle grand-père de Jean-Louis BERGHEAUD. Je le tiens du « Brenoï » lui même et je n’en suis pas peu fier. Il s’agit d’une prairie à présent recouverte d’arbres et donc une parcelle cultivable en moins comme il y en tant ! Hélas ! Au « Veillis » grand de quelques arpents, on y faisait la fenaison, on s’asseyait à l’ombre des grands arbres. A midi grand-mère apportait le repas. Ce sont des choses, des odeurs, des senteurs … qu’on n’oublie pas ! Au « Veillis » …
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Le 15 avril 2015 « Morituri » sera dans les bacs. Déjà « French lynx » est à disposition, distribué aux bonnes radios.
CD hors commerce interdit à la vente (recto/verso) …
La sortie du nouvel album de Jean-Louis MURAT, j’ai nommé : « Babel » est prévue pour le 13 octobre 2014. MURAT a conjugué son talent avec les membres du groupe « THE DELANO ORCHESTRA ».Nul doute que ce nouveau challenge va booster notre « Berger de Chamablanc ». Voilà aussi qui devrait donner du coffre à cet opus, lui apporter de nouvelles sonorités. Les mots et la voix de MURATconjugués avec le talent de ROCHON, PIEet consorts, il y a là je l’espère la recette du succès.
En préambule à la sortie de l’album, « PIAS » qui fait bien les choses, nous offre une compilation brillante comportant le titre : « Chacun vendrait des grives » … Le téléchargement est gratuit ! MURAT est bien entouré …
Message adressé à ceux qui l’aiment dont nous sommes ??? Cette carte dessinée par Jean-Louis MURATrecensant une partie des lieux où le p’tit BERGHEAUD a vécu son enfance … Il s’agit des endroits ou devenu homme Jean-Louisaime à se promener, se baigner, courir en solitaire … Toujours Jean-Louissera : « A la recherche du temps perdu » … celui qui ne se rattrape plus … Ce temps « malin » qui vous file entre les doigts …
Pascale CLARK dans sa nouvelle émission « A live » sur « Inter » aura été la première à nous donner à entendre le nouveau single : « J’ai fréquenté la beauté ». Ce titre est disponible en téléchargement sur les plates formes « iTunes » et autres.
Le regard de MURATme bouleverse. C’est celui d’un père, d’un grand-père qui, il y a peu, nous parlait du « Toboggan » sur lequel nous étions lancés. MURATs’interroge sur ce monde devenu « fou ». Il ne s’inquiète pas pour lui. Il regarde en arrière et nous invite s’il en est encore temps à sauver ce qui peut l’être … Il pense à ses enfants, à tous ceux qui vont devoir « payer la dette » … NOS ENFANTS…
« PIAS » nous délivre quelques superbes clichés du troubadour Auvergnat. L’homme est sombre et magnifique à la fois. Il ne cherche pas à faire beau, à nous plaire. Ses mots disent les maux de notre société dispendieuse et irrévérencieuse, qui ne respecte plus rien. Les menteurs les tricheurs, ceux qui, sans foi ni loi, nous gouvernent. Ils ressemblent comme deux gouttes d’eau à ceux qui étaient en place au préalable. Ils sont « les mêmes » à se succéder depuis que le « Grand Charles » est parti. Tous des « incapables », qui nous mènent au néant …
Du p’tit garçon qu’il était, Jean-Louis a conservé cette manie, lorsqu’il se promène seul, il siffle le temps qui passe … Jean-Louisest un bel homme qui n’a pas besoin d’artifice …
La nature est son amie, chaque jour, il écoute chanter les oiseaux, il admire le taureau qui régente son troupeau d’un regard fier et d’un coup de queue autoritaire … Une façon de dire : « Mais c’est qui le chef là-dedans » ??? !!!
Dans quelques jours Jean-Louis MURATchantera à « La Maroquinerie » (le 10 septembre) … Le 23 septembre MURAT sera à l’Olympia … Ce sera la deuxième fois !
Jean-Louispartagera l’affiche avec « Christine & The Queens » …
Chacun de s’interroger sur les raisons du choix de ce titre. Avant même que MURAT ne se soit expliqué c’est Armellequi au milieu du mois d’août sur Facebook nous donne la solution. Elle nous fait découvrir Saint Babel petit village situé près d’Issoire …
Pour autant Armellenous prévient : « Son Babel se situe plutôt autour de chez lui comme sur le plan qu’il a dessiné ».Armellea tout compris … Oui Monsieur MURAT vous êtes un homme complexe, mais il est des gens qui vous aiment tellement (sans être des fans béats) qu’ils parviennent à lire : « entre vos lignes ».
Le n° 979 des « Inrockuptibles » au travers d’une compilation de bon goût : « Une rentrée 2014″ nous donne à entendre le titre : « J’ai fréquenté la beauté » …
CD hors commerce « Les Inrockuptibles » (recto/verso/rondelle) …
Ce titre étant téléchargeable gratuitement, de par la volonté de « Pias » et de Jean-Louis MURAT, il n’y a donc pas de raison pour que je ne vous en fasse pas cadeau …Il me tarde d’être au 13 octobre 2014 …
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Débutée par le hors commerce « Inrocks » (ci-dessus), la campagne de promotion « PIAS » se concrétise par l’édition (nombre très limité) d’un dix titres magnifique comprenant les cinq premiers titres et les cinq derniers du double album …
Hors commerce 10 titres (recto/verso) …
Décidément « Pias » fait bien les choses. Le précommande cartonné est superbe …
« Pias » nous gratifie même d’une compilation hors commerce ou figure le titre : « J’ai fréquenté la beauté » …
Hors commerce (recto/verso) …
Le hors commerce « J’ai fréquenté la beauté » (2’52) fait également son apparition sur le marché dit parallèle …
H/C « J’ai fréquenté la beauté » (recto/verso) …
Dans son numéro d’octobre 2014, le magazine « Magic » nous propose une compilation particulièrement classieuse, comportant un titre du nouveau « Babel », soit : « Le blues du cygne » … Le tout est téléchargeable gratuitement sous réserve de disposer du code d’accès ! On n’a plus rien sans rien !
Le 11 octobre 2014« Babel » via la poste est rendu au domicile de ceux qui l’ont commandé comme moi auprès de la FNAC. Ce n’est que du bonheur …
Double CD « Pias » n° 5414939780622 (recto) …
CD n°1 : 1 Chacun vendrait des grives – 2 Chant Soviet – 3 J’ai fréquenté la beauté – 4 Blues du cygne – 5 Dans la direction du Crest – 6 La chèvre Alpestre – 7 Qu’Est-ce qu’au fond du cœur – 8 Les ronces – 9 Majude Ribe - 10 Vallée des merveille.
CD n°2 : 1 Le jour se lève sur Chamablanc – 2 Neige et pluie au Sancy – 3 Col de Diane – 4 Noyade au Chambon – 5 Tout m’attite – 6 Frelons d’Asie – 7 Long John – 8 Chagrin violette – 9 Camping à la ferme – 10 Passions tristes.
Face A : 1 Blues du cygne – 2 Chant Soviet – 3 J’ai fréquenté la beauté - 4 Passions tristes.
Face B : 1 Frelons d’Asie – 2 Chacun vendrait des grives – 3 Vallée des merveilles.
Face C : 1 La chèvre Alpestre – 2 Qu’est-ce qu’au fond du cœur – 3 Long John – 4 Mujade Ribe.
Face D : 1 Le jour se lève sur Chamablanc – 2 Neige et pluie au Sancy – 3 Col de Diane.
Face E : 1 Tout m’attire – 2 Les ronces – 3 Noyade au Chambon.
Face F : 1 Chagrin violette – 2 Dans la direction du Crest – 3 Camping à la ferme.
En 1989Jean-Louis MURATdéclarait à Thierry SECHAN: « Les musiques, les sons, c’est moins important que les mots ». Je sais, il a dit le contraire depuis ! Lors de la sortie de « Mustango » il déclarait à Fabien GOMMIERpour « Polystyrène » : « J’ai toujours privilégié le son au sens ». Mais qu’importe puisque, grâce à ce nouveau « Babel » MURAT réussit la synthèse parfaite qui fait que : la musique enjolive les mots et les mots magnifient la musique. Je m’explique. A l’écoute, à la lecture, à la relecture de ce nouvel opus j’ai une impression double qui pourrait sembler contradictoire mais ne l’est pas en fait :
Les mots sont au service de la musique.
Pour autant, jamais MURAT n’est allé chercher aussi loin son inspiration … dans la mémoire de Jean-Louis BERGHEAUD, ce petit-fils d’un couple de bergers de Chamablanc.
Pour la première fois sans doute MURATle poète fait fi (de façon ostensible) de la langue française et de ses règles grammaticales : il oublie les verbes, il omet les articles, il s’abandonne à la musique des « Delano ».Jamais MURATn’aura parlé aussi simplement. Jamais il n’aura autant mérité le qualificatif de poète. Jamais les mots nés de l’imaginaire de Jean-Louis BERGHEAUD n’auront été aussi bien accompagnés par la trompette de Julien QUINETet le violoncelle de Guillaume BONGIRAUD. Très souvent il utilise les points de suspension, sans doute pour laisser parler notre imaginaire. Ceci permet le défilement des images de notre propre vie … Il me semble que cette démarche n’est pas habituelle chez lui … On ne peut pas en dire de même pour tout le monde … Pour ce qui me concerne, ce n’est que ruse, je n’ai pas les mots suffisants …
La musique des « Delano » met en exergue une voix si belle, pour des mots ciselés, sculptés dans la beauté d’un bel esprit. Celui d’un paysan qui ne prétend à rien d’autre que d’être lui-même, que de dire merci à ceux qui lui ont permis d’être ce qu’il est. Même si c’est peu au regard de la reconnaissance d’un public non réceptif au talent d’un artiste qui ne se laisse jamais apprivoiser à la première écoute.
Je suis sans doute un fou, mais lorsque je prends possession d’un nouvel album de MURAT, mon premier geste est de prendre un stylo bille et une feuille blanche et d’y transcrire un à un les mots du chanteur d’Orcival. A la lecture de ce « Babel » j’en ai pris « plein la gueule ». Jamais MURATn’a utilisé un langage aussi simple. Peu de mots savants, peu de références à l’histoire, à la mythologie. Tout ou presque nous parle de son pays et de son enfance, de ses parents, de ce père qui n’est plus, de la « noirceur » de certains moments vécus …
Je vous livre ci-dessous certaines phrases concoctées par MURATqui à mon sens symbolisent le mieux cette poésie faite de mots simples, plus accessible sans doute.
Chacun vendrait des grives: « Tourner vers l’armoire/pour y rencontrer le miroir/dans son collier de laiton/que ce monde est con »
Chant Soviet: « La personne légèrement/humide/fait ce qu’elle veut de moi » . sur « Babel » le terme « humidité » dont il a dit qu’elle était « chérie » est utilisé à plusieurs reprises par J.L.M.…
J’ai fréquenté la beauté: « Chaque jour abreuvé/à l’illusion des toujours » (…)« J’ai fréquenté la beauté » (…) « à l’enchaînement des toujours ».
Blues du cygne: « N’oublie dans les mots/vit le malin ». Le terme « pas » est volontairement absent …
Dans la direction du Crest: « Le siège de l’âme c’est la forêt/le brouillard/les genêts » (…) « Poulain mal venu sous un/poirier/mon enfance disparaît ». L’animal est omniprésent …
Les ronces:« Quand nous partirons l’hiver/pour notre Sabbat au Veillis » (…) « Nous n’irons plus pêcher dans le/ruisseau des Grands Moulins »(…) « Je suis sur le grand lit/tendu entre moi et la nuit/je m’abandonne alors/à la mélancolie ». « Le Veillis » est une prairie ou Jean-Louisaimait à jouer pendant que le grand-père y travaillait …
Mujade Ribe: « Chardonnerets faucons cendrés cherchant un toit de maison pour s’abriter pour se coucher le temps d’une chanson » (…)« Ah tu préfères ne pas/un autre jour peut-être » (…) « Ou vont les morts ? »(…) « Arrête d’y penser ».
Vallée des merveilles: « Tout l’orgueil de tes souvenirs/pourtant, tu sais, papa est mort chacun se pense/paix et harmonie » (…) « Tu sais très bien trouver l’oubli/tu te nuis tout le jour/et chaque nuit tu vis/comme un porc/au goutte à goutte »(…) « C’est quoi tu dis ?/ Ah ! tu fais du sport ! »Dans notre beau pays faire semblant de courir vous rend intelligent … surtout lorsque vous avez de l’argent …
Noyade au Chambon: « Loup a vu les deux s’embrasser » (…) « Le loup a vu ce salaud la frapper »(…)« Loup a vu le beau plongeon/de la fille noyée »(…)« Pleine lune au mois de mai/les lapins n’auront/rien manqué ».A la campagne, il y a cinquante ans, il y avait toujours un témoin. Si ce ne sont les hommes, les animaux y pallient. Les histoires se transmettaient de générations en générations …
Frelons d’Asie: « Le veuf avait l’air joli/Il a les yeux de sa mère ».A la campagne, qu’elle soit de montagne ou d’ailleurs, les enterrements sont l’occasion de se retrouver, de discuter de tout, du mort, du temps, de demain et d’hier … et de bien d’autres choses encore … Le bistrot sert d’exutoire …
Chagrin violette: « Enfant mis/au chagrin des grands » (…) « J’ai de la pluie dans les yeux ».
Passions tristes : « Maîtresse à moi/nous n’aurons pas d’enfants ». Les maîtresses sont faites pour partager du plaisir, une épouse est vouée à avoir des enfants. Ce ne sont pas les termes exacts de MURATmais ça y ressemble … Je chercherai et trouverai, laissez moi un peu de temps.
Neige et pluie au Sancy : « Père ne faites pas de misère/à grande sœur à petit frère/Faut pas faire de mal aux petits ».Le p’tit BERGHEAUD avait une sœur plus âgée que loin … Il a dit « Chez nous c’était noir » …
Un titre symbolise à lui seul cet album. Toute l’enfance de MURAT y est relatée. J’y revois le facteur qui vient à la maison, l’étable, les foins à ramasser, le voisin qui vient donner un coup de main, la dame d’à côté qui va mal, telle autre qui va partir … La solidarité était de mise. Et puis un jour, dans les années 60 le Crédit Agricole s’est invité à la table, on n’a plus parlé que de « sous » et les soucis sont apparus …
Le jour se lève sur Chamablanc: « Les enfants dorment/c’est l’été/dans le pays ou je suis né » (…) « Là-haut surveille un Jean LEBLANC/le vieux ruisseau/part en chantant/à la recherche de/rien vraiment/dans le pays où dort l’enfant »(…) « Seul dans l’étable/Levacher/soigne le veau/de l’enragée/Grand-mère a mal/c’est l’été/dans le pays/où je suis né ».(…) « Le foin coupé/vers le Vendeix/sera tout bon/à ramasser/Martin vient/nous aider demain/Il sera tôt/si le temps nous tient ».(…) « Y’a si peu d’heures/à ramasser » (…) « C’t'y pas Henriette/labas au loin/qui nous fait/signe de la main ». (…) « Le bois va nous manquer ». (…) « Ils ont recouvert/de goudron le/chemin qui mène/chez le baron/on compte vraiment pour moins que rien/dans ce pays/ou tout me tient ».(…) « L’Yvonne est partie/en auto/Elle a encore si mal au dos/Encore huit jours/m’a dit Pierrot/Avant qu’on la retrouve au tombeau ».(…) « Encore ton père/mauvais qu’il est/qu’a pas encore fini/de cuver/cuver le vin/de nos moissons/ce vaurien/mérite pas son nom »…
L’écriture de cet album est superbe. MURATn’aura jamais été aussi grand … Jamais sa plume n’aura été aussi belle, sans qu’elle se « sente obligée » d’être rebelle … MURATs’est oublié … sur ce « BABEL » il n’y a que le p’tit garçonBERGHEAUD ! Lisez MURAT… écoutez MURAT… achetez MURAT !
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Ajout le 24 octobre 2014 …
Cela fait 10 jours à présent que je lis et relis « Babel » … Mon opinion est faite : pour bien des raisons cet album est le sommet de ce qu’a pu faire MURAT…
« Toboggan » c’était dix chansons qui n’en faisaient qu’une. « Babel » c’est plus encore, ce sont en effet vingt titres qui relatent jusque dans le plus intime l’enfance de Jean-Louis BERGHDAUD. L’enfance ??? Oui, la toute petite, celle passée chez Françoiset Thérèseses grands-parents paternels. Dans cette ferme plus que modeste, pauvre, il n’aura pour seuls amis que les animaux. L’enfance ??? Elle va loin puisque pour Jean-Louiselle ne s’achève définitivement (?) qu’avec le départ et la séparation de Marie AUDIGIER. Nous sommes à la fin de l’année 1993 et l’ami BERGHEAUD a 41 ans !
« Babel » nous relate tout cela dans le détail. « Babel » est sombre, dur, âpre. « Babel » est lumineux. « Babel » est : »mélancolie ».La musique des DELANOque certains trouvent par trop répétitive ajoute à cette beauté triste du temps qui passe …
Contrairement à ce qu’il laisse entendre, le chantre Auvergnatn’est pas sourd et insensible à l’attitude de quelques uns de ses admirateurs dont je suis, qui décortiquent toutes les paroles de MURAT pour en retirer la substantifique moëlle. MURATs’en amuse, il nous donne du blé à moudre. Dans telle phrase il va ajouter deux ou trois mots qui sont des souvenirs marquants connus de lui seul. L’ensemble est incompréhensible. Il faut trouver les clefs. Je me demande si « Passions tristes » qui est le dernier titre de l’album n’a pas été écrit à l’intention des « archéologues de la Muratie » que nous sommes. Moi qui ne suis qu’un « modeste » je m’en voudrais de paraître pompeux. Pourtant je suis convaincu de ce que j’avance. Deux phrases m’interpellent. Elles sont posées là comme un cheveu sur la soupe : « Je ne veux pas d’écaille sur mon poney »et « je ne veux pas la chèvre à l’établi ».J’ai mis longtemps à comprendre qu’il s’agissait là d’images, de flashes, ramenant Jean-Louisplus de 50 ans en arrière. Le Jean-Louisil était tellement fier du poney en bois, à bascule, sculpté par les mains de François ou peut-être même d’un père qui s’était éclipsé. De ce beau « poney »,il ne voulait pas que la vernis s’écaille … Quant à « la chèvre à l’établi »,tout comme « l’égoïne » ce sont des objets avec lesquels Françoistravaillait, faisant les sabots pour toute la famille, réparant une chaise ou un banc …
Dans « Frelons d’Asie »Jean-Louisécrit : « Si le chien est le gabarit, je ne veux plus te tourner ».Voilà des propos incompréhensibles. Vous pouvez les tourner dans tous les sens, c’est à n’y rien comprendre. Sauf qu’il font référence au titre : « Le jour se lève sur Chamablanc ». Jean-Louis y évoque : « La chienne et le dogue sont bien collés »(…) « Ils ont couiné toute la nuit ».Il a bien du rigoler le Jean-Louis… Il s’est dit : »Jamais ils ne trouveront » ! Lorsque j’étais petit chez moi à la ferme j’ai été témoin de ces scènes et je me demandais : « Pourquoi mon chien et celui du voisin restent collés ? ».J’ai mis longtemps avant de comprendre ! Voyez Mesdames, le chanteur MURAT pense bien à vous, il pense à la position des « chiens » et trouve qu’elle « vous irait fort bien » ! Pour la première fois sans doute, dans une chanson le poète MURAT fait référence à un texte précédent. Je vous ai bien dit que ces vingt chansons n’en faisaient qu’une …
Lorsque les mots sont extraits de votre propre vie, lorsqu’ils remontent à l’enfance, chacun d’eux évoque une image, une histoire, des larmes, des rires, des cris … Dans « Vallée des merveilles » vous découvrez tout à coup cette phrase : « Pourtant, tu sais, papa est mort ».
Au début de sa carrière MURAT déclarait : « Chez nous c’était sombre ». En 1989 déjà lorsqu’il reçoit chez lui le sieur BAYON, le chanteur Auvergnat se dévoile bigrement. Plus tard il regrettera s’être autant livré. Un jour il dira même (je cite de mémoire) : « Ce que j’ai fait avant ne regarde que moi ». Comme il a raison ! Pourtant, au travers des lignes de « Babel »Jean-Louis BERGHEAUDse dévoile comme jamais. Il nous parle avec des mots crus. Il a des mots durs. Ce sont les mots qu’il entendait lorsqu’il avait 5 ans. Dans la chanson « Le jour se lève sur Chamablanc » il est écrit : « Encore ton père/Mauvais qu’il est/Qu’a pas encore fini/De cuver/Cuver le vin/De nos moissons/Ce vaurien/Mérite pas son nom ».Les mots sont d’une dureté inouïe. Plus loin cette mention : « Grand-mère a mal/C’est l’été ».Dans « Chagrin violette » MURATchante : « J’entends le bruit du sang/Au soir de l’hiver/Je revois mère grand/J’entends les pleurs de mère/Père jeté en prison/Au soir de Novembre/Met mon cœur en prison/Les soirs de Novembre ».Le poète d’Orcival poursuit : « Quand tant de rancune fait/La dent/Enfants mis au/Chagrin des grands ». (…) « J’ai de la pluie dans les yeux ».
Le titre : « Neige et pluie au Sancy » est de la même veine : « Père ne faites pas de misère/a grand sœur à petit frère/Faut pas faire de mal aux petits ». A la sortie de l’album « Le cours ordinaire des choses », interrogé par Patrick POIVRE D’ARVORle « Brenoï » déclare : « Il faut être fier de ce qui nous a fait ».
MURATlorsqu’il était jeune, avec son épouse, se promenant en pays de « Babel » se comportait en satyre proche de l’obsédé sexuel, courant après elle, la couvrant d’étreintes sauvages. Dans « J’ai fréquenté la beauté » il avoue : « Derrière la Banne/Au Fohet, nu parmi les genêts/Je suivais la cavale amour ».
Dans « Passions tristes » MURAT soupire: « Maîtresse à moi/Nous n’aurons pas d’enfant » … Ce que disant, l’artiste se met en accord avec des propos tenus lors d’interviews précédentes ou il déclarait (de mémoire) : « Avec une maîtresse on recherche du plaisir, si l’on se marie c’est pour avoir des enfants ».Dans ce sens Marie AUDIGIERest toujours resté : « sa maîtresse » … Sans doute un regret, un manque …
Le titre « Dans la direction du Crest » nous ramène à la nostalgie : « La maison d’enfance/M’est revenue » (…) « Mon enfance disparaît ».
Sur ce double album les mots sont simples, les mots sont beaux. J’en veux pour preuve cette formulation : « Chaque jour/Abreuvé à l’illusion des toujours »
La vie de MURATest dans ses chansons. MURATest grand ! Dès à présent je vais pouvoir écouter ce nouvel album dans toute sa largeur.
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Mi novembre 2014, « PIAS » adresse aux radios le deuxième single hors commerce « Blues du cygne » …
Hors commerce « Blues du cygne » (recto/verso) …
Ajout le 21 avril 2015…
Au sortir de la tournée « Babel » MURATévoque déjà son nouvel album. Le 18 avril 2015 dans le cadre de l’opération « Disquaire Day » 33 tours (édition limitée à 1000 exemplaires) nous est offert par « Pias ». Voilà qui clôt très certainement l’épisode « Babel ».
Qu’est ce qu’au fond du cœur (live) – Les ronces (live) – Blues du cygne (live)
Face B :
Long john (live) - Mujade ribe (live)
A noter qu’à la surprise générale (il faut bien le reconnaître), un 3ème single : « Camping à la ferme » nous a été annoncé ! Il s’agit probablement du titre le « plus faible » de l’album, qu’il soit choisi comme single à de quoi surprendre, y compris les plus chauds partisans de MURATdont je suis ! A ce jour, je n’ai pas trouvé trace de ce single. Info ou intox ???
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Ajout le 17 septembre 2015 …
Le 25 septembre 2015 est prévue la sortie d’un CD et d’un vinyle (5 titres) comportant les mêmes titres que ceux figurant au disquaire day. Le vinyle reprend sa couleur classique : noire.
Avant que de procéder à une étude plus fouillée des articles parus dans la presse de l’album « Toboggan », par ce matin de printemps pluvieux, je vous livre mon « perçu » du dernier opus du « Berger de Chamablanc » …. Certains diront que c’est prétentieux de ma part … Qu’importe les mauvaises langues …
L’album « Toboggan », ce sont dix chansons qui n’en constituent qu’une seule. Ce sont les paroles d’un papa nostalgique, mélancolique, d’un monde qui n’est plus … ne sera plus … et s’interrogeant sur … DEMAIN ???
« Il neige », le silence entoure la campagne endormie. Il est 7 heures, les enfants dorment encore. Jean-Louis se revoit petit garçon, traînant dans les jupes de sa grand-mère. Dans la maison aux murs gris personne ne parle. François grommelle dans son coin. La vie était rude mais au moins on était heureux ! Il fallait travailler dur, mais on avait du travail ! Dehors le chien aboie … Aujourd’hui la vie n’est faite que du bruit assourdissant de nos écrans de télévision. Parole de journaliste est vérité toute faite. Rumeur colportée sur BFMTV est condamnation assurée. Plus personne n’entend aboyer les chiens, ni encore moins miauler les chats. Pis encore, les paysans n’en sont plus. S’ils ne peuvent accéder au statut d’industriel, ils meurent un à un. Ils se mettent la corde au cou … Jean-Louis met le nez à la fenêtre … « Tiens le renard a traîné par là » … Derrière les murs on devine, le froid, le vent, la glace qui vous saisit le corps. Il se revoit « petit », dans la nuit noire, accompagnant François, pour aller casser la glace de l’hiver et permettre aux vaches de se désaltérer … En ce temps là les « vivants » pensaient plus aux animaux qu’à eux-mêmes. Le bien être des hommes de la ferme, passait d’abord par celui de leurs animaux. Qui aime son chien, ne maudit pas son voisin … Passent les saisons, nous voici au cœur du printemps. Perce-neige et jonquilles ont déjà flétri. Nous sommes en Avril, dans les arbres les pies font leur nid … merles et grives chantent à tue-tête. Les jeunes veaux et « génisses » gambadent dans les champs. François rentre de la forge. Il y a bu un coup, deux puis trois … Il va falloir qu’il passe son courroux sur quelqu’un. Jean-Louis s’est retiré dans l’atelier du grand-père. C’est vrai, la vie n’était pas toujours rose, mais au moins nous étions heureux !
Ca y est … il est huit heures ! Gaspard et Justine sont à présent debout. Laure couve ses rejetons du regard. Une maman a l’œil a tout. Jean-Louis, regarde vivre ce petit monde. Il conseille : « Apprends à t’orienter de nuit/Apprends à t’orienter de jour » … Gaspard n’écoute pas. Il se moque de sa sœur. Voilà qui va se terminer par une dispute. Les enfants qui s’aiment, dans une famille qui s’aime, ont plaisir à se quereller … « Amour n’est pas querelle » (…) « Aimer c’est être aimé ». Dehors le « chat noir » traverse la cour, sans s’occuper de l’air du temps. Le chat semble insensible à tout. Le temps ne semble pas avoir de prise sur lui. Le p’tit Jean-Louis est reparti dans ses rêves. Il revoit « l’œil du cochon qu’on abat » et chante : « L’œil de la bête m’a regardé/L’animal est abandonné/Le tout/Jusqu’à l’éternité ». A la campagne … la mort est familière. C’est le petit veau mort-né … ce sont les larmes dans les yeux de grand-père … c’est de « quoi vivre » … qui s’en va … Tuer le cochon c’est donner à manger à la famille. En ce temps là, point de circuit parallèle vous trompant sur la qualité des produits mis dans votre assiette. A la campagne vous mangez rien moins que le fruit de votre travail. Toute la famille en vit. C’est la fierté du paysan. On ne mange que ce qu’on a. On ne vit pas à crédit. On ne dépense que l’argent en sa possession. On ne vit pas sur le dos des générations futures. Parfois donc, la pitance est maigre. Un morceau de quignon, un bout de lardon … ce s’ra tout pour aller au lit, pour passer la nuit. Le matin c’est bol de lait, tout juste soutiré du pis de la vache, tout chaud … François ne dit mot. Il pense à la vieille vache qu’il faut vendre … Le chien du voisin aboie encore, aboie toujours …
Retour au présent, les enfants sont partis avec leur mère à l’école … Il neige dru … « La nature alentour s’est enterrée » … « Dans sa bergerie rêve/Le berger endormi ».
Ce « Toboggan » est un pont entre générations … ceux qui vont partir et le savent (nous les vieux) … ceux qui ne s’en soucient pas (eux les jeunes) … C’est aussi un grand point d’interrogation : « De quoi demain sera fait ? Qu’allons nous laisser à nos enfants ? ». Jean-Louis MURAT vous êtes bien le seul artiste de renom à avoir ces préoccupations et à en faire le sujet principal d’un album. Certains railleurs disent que vous êtes trop « triste » trop « chiant ». Ils n’ont pas compris que vous étiez « grave ». Il y a quelques jours au Trianon, chantant vos petites chansons, c’est à ça que vous pensiez … « ce monde qui n’est plus » et plus grave encore « ne sera jamais plus » ! Certains trouvent que vous n’avez pas assez parlé, commenté … que vous n’avez pas écouté leur demande de rappel … Certains en ont même écrit des ignominies. Ils n’ont pas compris qui est Jean-Louis MURAT … un papa soucieux de « demain » … plume légère et belle … à la voix rocailleuse et cristalline qui porte en elle le roulis de … : « l’eau de la rivière » … où enfant, il allait pêcher la truite à main nue …
Merci Monsieur Jean-Louis MURAT de ce merveilleux « Toboggan » … Je me suis introduit chez vous. Je n’ai pas fait de bruit. Je n’ai dérangé personne. Loin de l’Auvergne, le petit Breton, fils de paysan que je suis, se nourrit de vos mots … En écoutant ce « Toboggan » je n’ai pu m’empêcher d’avoir une pensée très forte pour Jean-THEFAINE autre Breton qui savait si bien parler des mots de Jean-Louis BERGHEAUD …
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« Toboggan » bénéficie d’une production classique , agrémentée de celle de « Toboggan spécial » …
CD 10 titres « Pias » n° 5 414939 399320 date de sortie le 25 mars 2013.
Listing : 1 – Il neige 2 – Amour n’est pas querelle 3 – Over and over 4 – Le chat noir 5 – Belle 6 – Robinson 7 – Agnus Deï babe 8 – Extraordinaire Voodoo 9 – Voodoo simple 10 – J’ai tué parce que je m’ennuyais.
Listing CD 2 : 1 Mousse noire (live) 2 – Yes Sir (live) 3 – Jim (extrait/live).
33 tours « Pias » n° 5 414939 389214.
Face A : 1 Il neige 2 Amour n’est pas querelle 3 – Over and over 4 – Le chat noir 5 Belle.
Face B : 1 Robinson 2 – Agnus Dei babe 3 – Extraordinaire Voodoo 4 – Voodoo simple 5 – J’ai tué parce que je m’ennuyais.
CD hors commerce « Amour n’est pas querelle » production (n°903)« Les Inrockuptibles ». Ref. LI 13 229. Date de sortie le 13 mars 2013.
CD hors commerce – Acétate « Amour n’est pas querelle ».
CD hors commerce « Over and over » (3’54). Edition limitée, réservée aux médias. « Pias » pas de numéro.
CD hors commerce « Le chat noir » (2’51). Edition limitée réservée aux médias. « Pias » pas de numéro.
CD hors commerce 10 titres (Edition très limitée). « Pias » n° 942 A865 220.
CD hors commerce vidéo « Over and over » (2’47). « Pias » pas de numéro.
45 tours (sortie le 20 avril 2013) à 350 exemplaires comportant 2 titres : 1 Over & over 2 Il neige. « Pias » n° 5 414939 393914
Double CD (sortie le 15 novembre 2013) « Toboggan spécial » comportant 5 inédits live … « Pias » n° 414939579523
Exemplaire scellé avec publicités diverses (recto)…
CD 5 titres hors commerce (n° 192/200) … recto … rondelle … verso …
Single (hors commerce) « L’eau de la rivière » …
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L’album « Toboggan » semble s’inscrire dans une suite et constituer le 3ème volet d’un triptyque. En effet « Le cours ordinaire des choses »(2009) nous parle d’un « aujourd’hui » ou Jean-Louis BERGHEAUD ne trouve pas sa place. Avec « Grand lièvre » (2011) MURAT rend hommage à ses aïeux qui ont défendu la terre de leurs ancêtres et celle de leurs enfants. Cet album « aux grandes oreilles » est un vrai retour aux racines, on y retrouve comme jamais le p’tit BERGHEAUD … celui de la fanfare municipale … « Toboggan »(2013) constitue la suite logique des deux précédents albums. MURAT s’interroge sur l’air du temps. Que sera demain ? Quelles perspectives donnons nous à nos enfants ? Pire encore quel monde allons nous leur laisser ? Trois albums … ou nous cheminons d’aujourd’hui à demain en passant par hier …
Dans le cadre de la promo le 22 mars 2013 dans un communiqué « AFP » on peut lire : « De nombreux titres de l’album parlent de religiosité, de culpabilité, d’un renversement des valeurs dans lequel dit-il : « On trouve des excuses aux coupables et on cherche des noizes à l’innocence ». MURAT poursuit : « Je trouve qu’il y a une faillite morale dans laquelle on s’enfonce. Je suis toujours resté sur cette idée en faisant le disque ». Ces propos sont tenus bien avant que n’éclate l’affaire « CAHUZAC » … C’est dire la pertinence des propos de MURAT … MURAT a toujours raison, a souvent raison … Mais où sont donc passés ces « donneurs de leçon » : les NOAH … BENABAR … qui péroraient sur les podiums de ceux promis à la Présidence ???
Dans les colonnes de « Magic »(avril 2013)Renaud PAULIK interviewe MURAT : « Toboggan un album sur les sentiments ? ». Réponse de l’Auvergnat : « Je n’aime pas trop m’apesentir là-dessus. Je l’ai beaucoup fait avec Dolorès (1996). Je préfère monter le niveau à chaque fois et rester sur les désaccords entre nous et notre nature, nous et nos idéaux. Le couple est devenu une sorte de bombe à retardement dont on augmente tous les jours la charge explosive avec des problèmes non réglés supplémentaires, des problèmes qu’on a avec nous même, la famille, les parents, l’endroit où l’on vit, notre langue, nos idées surnaturelles ». PAULIK enchaîne : « Aujourd’hui, s’agirait-il d’une difficulté de s’aimer soi-même ? ». La réponse fuse : « Oui, j’en suis plus là. J’ai un tel égo qu’après m’être ainsi divisé entre MURAT et BERGHEAUD, j’en suis à comprendre pourquoi je n’arrive pas à marier les deux. Le mariage pour tous m’aidera peut-être. En attendant, j’ai un peu de difficulté ».
Triptyque vous disais-je ??? Oui … Où suis-je ? (2009) – D’où je viens ? (2011) et Ou vais-je ? (2013). MURAT esthète des mots, troubadour des temps modernes, paysan sans terre … est tout sauf un chanteur comme les autres.
Merci à vous Monsieur Jean-Louis MURAT d’être fidèle au p’tit BERGHEAUD que vous aimez beaucoup malgré vos dénégations. Vous voyez vous ne dites pas le contraire … Si si le p’tit BERGHEAUD … celui qui jouait dans la fanfare … qui accompagnait François au bistrot … qui parlait aux vaches … qui aimait Françoise … et l’aime toujours un peu … N’est-il pas ??? Merci Monsieur Jean-Louis MURAT (vous le poète ignoré) de nous dresser à chaque nouvel album un portrait sans concession de notre société … où décidément tout va à veau l’eau … Hélas pour nos propres enfants ! Un jour viendra où l’on reconnaîtra les qualités de visionnaires qui son les vôtres …
Il me tarde d’être au 14 mai … jour de concert à Rennes … et je vous dirai droit dans les yeux : « Merci … vous êtes un mec bien ! » Je n’ai rien d’autre à vous dire …
Après deux années d’attente, le 26 septembre 2011 « Grand lièvre » est dans les bacs. Beaucoup de critiques, des plus avertis, parlant de cet album, disent que : « jamais MURAT ne s’est autant ouvert sur le monde ». Cela est vrai. Mais ce qui l’est plus encore c’est de constater que : « jamais il n’a été autant chercher au plus profond de lui même » … les mots, les idées, les références de ses chansons nouvelles.
Une lecture attentive de ce nouvel opus (ce qui est loin d’être le cas de tous les journalistes … ) permet d’affirmer que MURAT porte cet album en lui depuis des années. En 1989, lors de la sortie de « Cheyenne », répondant aux questions de Christian FEVRETon s’aperçoit qu’il porte en lui : « la cassure » … dans laquelle s’est engouffré ce « grand lièvre ». Ecoutons le …
« Je suis d’origine auvergnate. Depuis des siècles ma famille est la-bas, je me suis attaché à la terre. Je me sens bien dans les paysages ». (…) « Je me sens bien au milieu de ces gens là, de la manière dont ils peuvent parler de l’âme humaine ou de la terre ». (…) « En faisant des chansons, » (…) « je me suis rendu compte que ce sont toujours les rêves de l’enfance qui m’alimentent dans ma vie d’adulte, et mon pays est toujours dans mes rêves d’enfance ». (…) « J’ai l’impression de ne vivre qu’avec la mémoire. Pas de vivre dans le passé, mais de vivre dans le présent avec la mémoire. Aimer la mémoire au présent, c’est quelque chose de dynamique. La mienne celle qui me nourrit, s’est terminée vers 13 – 14 ans. J’ai eu une enfance tellement particulière, par laquelle j’ai été tellement marqué, que ça s’est arrêté là ». (…) « Mon grand-père était un homme du Moyen-Âge, avec toutes les qualités du Moyen-Âge et sans les défauts du XXième siècle ».
Dans une autre interview de 1989 il déclare à Jean-Marc THEVENET: « Je suis presque exclusivement un nostalgique mais attention un nostalgique dynamique. J’ai toujours un oeil dans le rétro. Dans le présent je me noie et l’avenir c’est abstrait, ça n’existe pas. Je voudrais savoir d’où je viens ». (…) « Il faut sans cesse passer par la mémoire, » (…) « cela ressemble à nos chemins en Auvergne, la mémoire c’est tortueux ». (…) « Je crains le souffle du temps sur moi » …
Mais revenons à l’interview accordée à C. FEVRET à qui il parle de ses espoirs : « Moi j’espère vendre pas mal de disques, mais l’une de mes motivations essentielles est de passer mon diplôme agricole, de racheter une ferme et de refaire le lien avec ce que j’ai vécu dans l’enfance. C’est une idée fixe chez moi. Refaire le paysan, reprendre les choses où mon grand-père les a laissées. je me sens issu du monde paysan, la cassure a été faite par mon père comme par beaucoup de types de sa génération, c’est à dire que dans les années 50, ils auraient pu continuer à faire le paysan, reprendre les fermes ou les boulots de leurs parents. Mais ils ont été attirés par la ville ou bien se sont trouvés à travailler différemment. Il y a donc un maillon manquant dans cette filiation strictement paysanne, qui est la génération de mon père. Et j’ai envie de refaire le lien, c’est évident« .
Petite parenthèse … « Le lien défait »… ça vous dit rien ??? Je pense que dans ce titre il y a un peu, de ce dont nous parle Murat plus haut !!!
Ce préambule nous a mené jusque « Cheyenne Autumn »… « Cheyenne » ??? mais bien sûr … « les indiens » … John WAYNE … et maintent « Grand lièvre »??? Réminiscence des légendes indiennes ??? Conte pour enfants ??? Qu’importe … MURAT n’a t-il pas dit (ce ne sont pas les mots exacts) : « On fait toujours la même chanson … Il n’y a que les mots qui changent ». C’est sûrement vrai, le contexte n’est plus le même … les sentiments ne sont plus là, où vont vers d’autres …
Dans le cadre de la Promo pour « Var Matin »le 9 octobre 2011 MURAT évoque l’enregistrement de cet album effectué à … St Paul de Vence … « Ça me rappelle des souvenirs, parce que c’est là que j’avais enregistré « Cheyenne Autumn » … Vous voyez … on y revient. Connaissant la personnalité de MURAT … il y a là toute une symbolique qui n’est pas gratuite.
Mais plus de vingt ans ont passé … MURAT est l’heureux papa de JUSTINE et GASPARD. Il a un boulot à plein temps, celui d’être papa … L’avenir ??? C’est déjà « demain » … ce n’est pas … « loin » et surtout c’est … « court » … c’est plein … d’incertitudes … Le « Grand lièvre »porte en lui tous les souvenirs de l’enfant BERGHEAUD et toutes les inquiétudes du papa MURAT. On y retrouve les silences et les leçons de vie de François (le grand-père) … Nous effleurent ces images où Jean Louis aide EMILE (le voisin) à rentrer les vaches, à soigner les boeufs à discuter de rien, à discuter de peu, à écouter le vent, à entendre chanter la pluie … FRANCOIS et EMILE ne sont plus … Jean-Louis les aimait tant … jusqu’à son dernier souffle ils seront ses compagnons … ceux à qui l’on peut tout dire … à qui il n’est rien besoin de dire pour qu’immédiatement la réponse vienne …
Ce « Grand lièvre »résonne aussi des flonflons de la fanfare municipale où, en compagnie de son père, de copains de son âge, le p’tit BERGHEAUD participait aux défilés du 11 novembre ou du 14 juillet. Tout le monde se retrouvait au bistrot du coin, pour parler de ceux qui avaient fait la guerre (14-18) ou acte de résistance (39-45) … « Pitié pour le cheval » et « Rémi » trouvent davantage leur raison d’être dans ces souvenirs que dans l’apologie de la guerre ou d’un patriotisme quelconque.
Le contexte a changé … les paysans se sont fait rares du côté des montagnes d’Orcival. Les tracteurs ont remplacé le cheval … la moissonneuse batteuse la lieuse … les prairies se sont couvertes de genêt … les dettes ont pris la place d’économies chichement mises de côté … L’eau et l’électricité ont apporté un peu plus de confort. Mais les têtes se sont faites lourdes. La télévision aux repas du midi et du soir a remplacé les silences. On se parle moins qu’avant … et à présent … les silences ne sont que doutes et incertitudes, gravité et désespoir. « X »… s’est mis la corde au cou … « Y »… s’est jeté dans la fosse à purin. Les technocrates pullulent tandis que les paysans sont de moins en moins nombreux. MURAT ne s’est jamais détourné de ses valeurs paysannes. Certains disent de lui que c’est un « dandy paysan » un « bobo » … Non … on ne peut pas tromper EMILE comme ça ! Jean-Louis BERGHEAUD … vous savez, « celui qui passe à la télé de temps en temps » … plus brocardé par ses congénères que montré en exemple … le « Jean-Louis » se rend toujours au bistrot du coin pour y parler du prix de la viande, du temps qui passe, de ceux qui ne sont plus … Ce BERGHEAUD là … il n’a pas changé d’un iota … c’est celui que l’on retrouve en filigrane tout au long de ce « Grand lièvre ». C’est en parlant avec ces paysans qu’il s’est convertit à des idées plus terre à terre … des idées faites de bon sens … Certains ont même dit qu’il était « réac » … Quelle bande de nigauds … ces gens partisans de la « pensée unique » …
Pour « Var Matin » MURAT précise : « Grand lièvre, au départ, c’était le titre d’une chanson ». (…) « On ne l’a pas enregistrée, mais je trouvais que ça collait toujours bien au projet : la nature, les choses en voie de disparition … ». Dans le même article il assène : « C’est un disque sur la perte et l’échec ». (…) « Les textes sont inspirés par la lente transformation du paysage rural dans lequel je vis, la crise et l’Europe qui se défait. Ma génération aura vécu la montée de la construction Européenne et sa chute probable ».
Adrien TOFFOLETpour « Evene.fr » écrit : « Grand lièvre à l’opposé de l’album précédent, est un disque français, à l’écriture poétique et pointue, par moments politique mais sans être partisane. MURAT y oppose les styles de vie et valeurs des campagnes. « Haut Arverne » et « Vendre les prés » dans lesquelles le chanteur dépeint « un monde moderne et son cul plein de boue/accusant la montagne d’être obstacle à la joie ». Il s’agit d’un manifeste pour la simplicité … du mode de vie et des musiques ».
Les textes de cet album dévoilent une écriture simple mais fournie. MURAT emploie 2209 mots pour 798 mots différents. Ce n’est pas rien. Vous prenez les chansons une à une … jamais un mot ne fait doublon … c’est un travail remarquable. Les générations futures rendront grâce à MURAT de cette qualité … http://didierlebras2.unblog.fr/3-dictionnaire-muratien-grand-lievre-2011/
Pour « L’Echo Républicain » du 10 octobre 2011 MURAT répond aux questions de Rémi BONNET:
R.B. : Les nouvelles technologies nous proposent toujours du neuf …
JLM : Il y a une boulimie de ça, et ça nous pète à la gueule. On est entouré de gens qui sont enfermés dans des bulles spéculatives de leur propre vie. On est dans une fuite en avant, comme si l’ancien monde ne représentait plus rien.
R.B. : Avez-vous conscience d’avoir créé une oeuvre ?
JLM : C’est vrai que les disques commencent à s’accumuler, mais je préfère ne pas y penser. Plus j’avance et plus je pense au futur. Mon prochain disque est déjà prêt. Je vois tellement de transformations dans la société que ça m’inspire énormément. Notre époque est terrifiante, on arrive à un état de décomposition où on ne sait plus où donner de la chanson.
Thierry GANDILLOTpour le compte du journal « Les Echos » interviewe l’Auvergnat qui lui confie : « Chez les indiens d’Amérique du Nord, le lièvre, architecte de l’univers, est un esprit farceur, sauvage et libre comme l’air. Rétif à toute domestication ». (…) « Grand lièvre » ??? « Le sens je m’en fous un peu. J’aime surtout la graphie de ce titre, sa sonorité. A l’oreille, en bouche, ça se tient. Je pratique une poésie instinctive, je n’aime pas la poésie pensée. Le rap c’est la mise à mort de la poésie, ce qu’il y a de plus bête dans l’art poétique, le mécanisme mis à nue de façon simpliste ».
Répondant aux questions de Patrice DEMAILLY(25 septembre 2011) pour le compte de « Nord Eclair » MURAT explique les raisons qui ont motivé le choix de ce titre : « C’était un titre provisoire. Qui est devenu définitif. On ne sait jamais comment les appeler. le lièvre, c’est aussi une espèce en voie de disparition ». Le journaliste lui rétorque : « Comme vous ? » Ce à quoi il répond : « En tant que chanteur absolument. La chanson Française est, elle aussi, une spécialité en voie de disparition. Ce n’est pas une extinction mais une lente transformation. Elle devient du folklore. C’est son danger. Tous les nouveaux groupes chantent en anglais ».
P.D. : Sur ce disque vous donnez l’impression d’être en paix avec votre voix ?
JLM : Peut-être qu’avec le temps je commence à chanter comme il faut … Mais c’est vrai que je suis libéré avec le chant. Avant, j’étais dans des stratégies de dissimulation ».
Les 10 chansons de cet album (onze avec l’inédit) recèlent de phrases qui révèlent tout les talents d’écriture de MURAT. Le single « Les rouges souliers » présenté comme chanson à rythme, sans ambition, à la lecture se révèle être une … »bien belle chanson » …
(…)
« Etre amoureux de Toi
Pour qu’on s’occupe de Moi.
Les choses à vivre ici
N’ont jamais goût de paradis ».
(…)
« Toute éponge gorgée d’eau
Se croit la forme du beau.
Je pense à cette idée bleue
Je vole dans la nuit des Dieux ».
(…)
L’inédit « Ne t’attends qu’à toi seul » comporte une phrase superbe …
(…)
« La fente du volet
Est une vaste plaine »
(…)
… pour qui sait ouvrir les yeux … regarder le monde …
Pendant des années, à la sortie des disques de Jean-Louis MURAT l’apanage de la plus belle interview ou chronique revenait à Jean THEFAINE. Le Rennais a rangé ses crayons. Pour la sortie du « Grand lièvre » c’est sans conteste un autre journaliste Breton qui (selon moi) remporte la palme. Il s’agit de Michel TROADEC. Ce dernier, le dimanche 2 octobre 2011 dans la rubrique culturelle « Ouest France » écrivait parlant de ce nouvel opus et de son interprète : « Une nouvelle fois, il chante merveilleusement la condition humaine, en poète rural, amoureux et inquiet ».TROADEC va jusqu’à poser la seule question qui vaille : « A-t’on jamais écrit ainsi dans la chanson Française ? ». Il répond sans ambage : « Pas au niveau de notoriété de jean-Louis MURAT« .Il poursuit : « Ecouter MURAT c’est goûter au plaisir de la phrase, de la poésie chantée ». (…) « Ecouter MURAT c’est se laisser bercer par le verbe, quitte à ne pas tout comprendre ». Ces mots n’ont que plus de valeur quand on sait que ce journaliste tout comme THEFAINE n’est inféodé par aucun « appareil » … Il ne « roule pour personne ».
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Le « Grand lièvre » bénéficie d’une production classique comportant :
CD boîtier plastique « Scarlett V2″ n° 2775290 doté de 10 titres : (1 Qu’est-ce que ça veut dire ? (6’48) - 2 Sans pitié pour le cheval (3’39) - 3 Rémi est mort ainsi (4’46) - 4 Alexandrie (6’34) – 5 Haut Arverne (5’46) – 6 Je voudrais me perdre de vue (5’19) - 7 Vendre les prés (3’40) - 8 Le champion espagnol (4’26) - 9 Les rouges souliers (3’53) – 10 La lettre de la pampa (3’57).
Double CD digipack (cartonné) « Scarlett V2″ n° 2775291 – CD 1 : les 10 titres ci dessus – CD 2 : 8 titres Live Coopé (1 16 heures Qu’est-ce que tu fais ? (7’33) – 2 Chanter est ma façon d’errer – 3 Le train bleu (5’38) – 4 Mousse noire (5’54) – 5 Pauline à cheval (4’21) - 6 Taormina (7’37) – 7 Yes Sir (5’24) – 8 L’examen de minuit (7’07).
33 Tours « Scarlett V2″ n° 2779821 avec huit titres.
Face A : 1 Quest-ce que ça veut dire (6’48) - 2 Sans pitié pour le cheval ( 3’39) - 3 Rémi est mort ainsi (4’46) - 4 Vendre les prés (3’40).
Face B : 1 Haut Arverne (5’46) – 2 Je voudrais me perdre de vue (5’19) – 3 Ne ‘attends qu’à toi seul (5’55) – 4 Le champion espagnol (4’26).
CD Hors commerce »Scarlett V2″ n° LC 01801/2789255 – monotitre « Les rouges souliers » (3’53).
CD Promo – compilation « Les Inrockuptibles – Rentrée Août 2011″ n° CD LI 11208 – avec le titre « Les rouges souliers » (3’53).
1 carte postale au logo « Grand lièvre » réservée aux abonnées des « Inrockuptibles ».
1 CD Hors commerce « Scarlett V2″ sans n° interdit à la vente – monotitre « Vendre les prés » (3’40).
1 sampler « Scarlett V2″ LC 01801/2786749 – CD à usage promo (interdit à la vente) 3 titres : 1 Vendre les prés – 2 Ne t’attends qu’à toi seul – 3 Tous les chanteurs sont malheureux (Démo) (3’49). Ce CD pochette cartonnée était résevé aux abonnés du journal « Libération » – Tirage : environ 100 !
1 collector « Les Victoires de la musique 2012″ – »Scarlett V2″/Polydor n° 0252794397 8 comprenant les 10 titres de la version originale – Edition limitée. (Date de sortie le 24 février 2012).
A noter l’existence d’une version radio édit du titre « Alexandrie » (4’03) au lieu de (6’34).
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Au final cet album est un beau cadeau que nous fait MURAT. C’est un disque tout en contrastes qui nous permet de voyager de l’Auvergne jusqu’à la « pampa ». C’est une ouverture sur le monde d’aujourd’hui (avec ses problèmes) mais également un renfermement sur soi-même avec des tas d’interrogations qui tiennent à « demain » ??? Le meilleur exemple nous est donné par le titre « Qu’est-ce que ça veut dire ? » MURAT y mêle le « chaud » et le « froid ». Deux phrases retiennent mon attention :
« La vie est une beauté/Merveilleux d’être en vie » … tout en optimisme …
« Au chapitre de ma vie/Est-ce le dernier voyage ? » … tout en questionnement …
A 60 ans vous ne regardez pas l’avenir de la même façon qu’à 20 ans. C’est une banalité que de le dire. C’est autre chose que de le vivre. Inexorablement on s’éloigne d’un « bout » pour se rapprocher de « l’autre ». Les questions sur nous même n’ont guère d’importance. Elles valent pour ceux qu’on aime. Que sera demain ???MURAT pense à GASPARD à JUSTINE … à leur mère. Comment les prémunir de ce « monde qui broie tout … qui ne vaut que par le fric … le paraître » ??? Chacun, à notre niveau, nous aurons à répondre à ces questions. Pas plus que nous, MURAT n’a les réponses … Comme tout un chacun il … « ESPERE » … Le concernant, il nous dit en forme de clin d’oeil : « Je n’ai pas peur de l’hiver » et signe … « jlm » …
En juin 2009, avant de se produire à la « Coopé » pour le compte de « Koloko » MURAT se livre au journal « La Montagne » et parle de ses démêlés avec le public Clermontois : « Je ne sais plus sur quel album « Mustango » peut-être, le tourneur pour faire plaisir à tout le monde, décide de finir ici. J’avais prévenu : nul n’est prophète dans son pays. La tournée a super bien marché. La veille, à Besançon je crois, c’était génial. Là, ça a été le plus mauvais, le moins chaleureux des concerts de toute la tournée. J’ai pris une grosse gifle, alors j’ai décidé que c’était terminé. Mais tu sais, déjà avec CLARA, quand on venait de La Bourboule, c’était ça. Je ne sais pas quel est le phénomène mais je ne suis pas masochiste, ça va (…) ! Je fais quand même un concert par an, celui-là … » Au cours de ce concert humanitaire il délivrera un inédit du futur album …
Il en profite pour nous parler de son nouvel opus qui ne doit sortir qu’en Septembre : « J’ai enregistré à Nashville, donc c’est assez … américain … avec un son de Nashville ».
Ce dernier album bénéficie d’une production variée et intéressante.
CD « Le cours ordinaire des choses » …
CD n° 5320540 V2 Scarlett (sortie le 21 septembre 2009) comportant 11 titres soit : 1 Comme un incendie (5’40) – 2 Falling in love again (4’43) – 3 M. maudit (2(56) – 4 Chanter est ma façon d’errer (4’21) – 5 Lady of Orcival (4’33) – 6 Seize heures Qu’est-ce que fu fais ? (3’40) – 7 Ginette Ramade (3’27) – 8 La mésange bleue (6’07) – 9 Comme un cow-boy à l’âme fresh (3’09) – 10 La tige d’or (5’29) – 11 Taïga (4’59).
CD + DVD digipack carton V2 Scarlett n° 5320582 (11 titres et DVD d’une durée de 45 minutes)
33 Tours n° 5320969 V2 Scarlett (9 titres) – manquent les titres 6 et 7 (voir ci-desus).
CD promo hors commerce (11 titres) n° 12638.
DVD hors commerce n° 5320583.
CD monotitre hors commerce « Comme un incendie » (durée de 3’20 – différente du CD original) – n° 12178.
CD monotitre hors commerce « Comme un cow-boy à l’âme fresh » (durée de 3’20 différente du CD original) – pas de numéro de référence.
1 clip non officiel « Comme un cow-boy à l’âme fresh ».
La critique dans son ensemble est flatteuse quant à la qualité de cet album. Pour preuve ce « papier » signé Christian LARREDE sur le site « Music Story » . Je cite : « Cela fait bien longtemps que l’on n’a pas siffloté un refrain de MURAT pour rendre moins grisâtre le quotidien (…) Ce que l’on peut considérer comme le 20ème album de l’Auvergnat offre un vrai disque de chansons en suspension comme le veut la grâce naturelle du bonhomme. Dans « Le cours ordinaire des choses », l’homme à tête d’arbre (cf illustration du livret) rappelle en quelques murmures modulés qu’il règne à tout jamais aux côtés de MANSET et CHRISTOPHE et quelques rares autres, au mitan du désert de la chanson francophone ».
Pour « Les Inrockuptibles » Arnaud PANCHENNE dit simplement : « Le cours ordinaire des choses n’a d’ordinaire que son titre ».
Dans le journal « Nice Matin »MURAT parle de cette deuxième expérience américaine après « Mustango. Il répond aux questions de Philippe DUPUY :
Question : Pour un chanteur campagnard, on suppose qu’enregistrer dans la patrie de la country faisait partie d’un vieux rêve ?
JLM : Cela faisait très longtemps que je voulais y aller. (…) J’avais envie de me retrouver avec du vieux matos, de vieux musiciens et de faire un disque comme on les faisait encore au tout début des années 70.
Question: Peut-on comparer cette expérience à celle de Mustango également enregistré aux USA ?
JLM: Pas vraiment, Mustango, c’était plus sophistiqué. les musiciens New Yorkais sont beaucoup plus snobs. A Nashville, ils ont l’habitude des chanteurs, la voix est toujours très en avant. Ils vous accompagnent vraiment alors qu’ailleurs ils ont plutôt tendance à jouer dans leur coin. (…) Je voulais juste les meilleurs et qu’ils jouent pour moi. C’est ce qu’on a fait ».
Au cours de la campagne de promotion, ou MURAT parle de son rôle de père dans le journal « Libération » : « Je suis toujours bouleversé par l’errance des enfants qui ne savent d’où ils viennent ». Il explique par ailleurs au journaliste que : « désormais il dédie ses journées à l’éducation de Justine et Gaspard … lecture de la Comtesse de Ségur, herbiers, improvisations musicales ou poétiques … ». Le rôle de chanteur est relégué en soirée. Il poursuit : « Je veux être présent, et être un bon père, à savoir : constituer une référence solide, même une fois disparu« . Dans cet article il est indiqué également que MURAT emménage sa maison de façon à pouvoir accueillir toute sa famille. Il évoque ce qu’il a connu chez ses parents : « bagarres, haines, je me demande comment il n’y a pas eu de mort ». Puis ses grands parents : « Mon grand-père était violent, bagarreur saoul comme un cochon tous les jours, à partir de 15 heures ».
En octobre 2009, dans le mag . « Rolling Stone » il déclare : « Je trouve tous les comportements hypocrites. Et quand on dit ça, les gens pensent aussitôt : « Il se prend pour qui ? » Ce à quoi ERIC TANDY le chroniqueur lui répond : « Ce qui n’est pas bon pour l’image d’un chanteur » … Murat ne peut qu’acquiescer : « Bien sur, j’ai d’ailleurs conscience que le « Il se prend pour qui ? » fait l’essentiel de mon image négative auprès des gens … La chanson est une sorte de friche tristement à part où l’impertinence et l’originalité ne sont pas acceptées. (…) Aujourd’hui, l’hypocrisie bourgeoise est tellement présente dans la société française – peut-être même plus qu’au temps de BALZAC et de FLAUBERT - qu’aucune démarche fondamentalement marginale ne peut plus exister ».
Ce dernier album du Brenoï recèle de textes absolument superbes … J’en veux pour preuve :
Ce nouvel opus a été enregistré en Auvergne pendant l’automne 2007 par Aymeric LETOQUART (déjà responsable de l’enregistrement et du mixage de « Taormina » en 2006). De ce disque MURAT dit lui même : « Tristan est un Sancy de tristesse. Il ne s’entend bien que si l’on pense comme moi, que Dieu est une femme ».
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Toujours dans le cadre de la campagne promo, à l’AFP le 26 mars 2008 il déclare : « J’ai tout fait à la maison parce que ce n’était pas possible autrement. C’est la première fois que je fais un disque comme ça : je l’ai enregistré chez moi, je joue de tous les instruments et je chante, ce qui donne sûrement un côté feutré ».
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Pour le « Figaro Madame »MURAT se livre sans concession et répond aux questions de Laurent MEREU/BOULCH. Les questions sont simples et directes, les réponses vives. C’est ce qui m’a plu dans cette interview.
Question : A quel moment avez-vous été le plus heureux ?
JLM : A la naissance de mes deux derniers enfants : ma fille Justine en 2004 et mon fils, il y a 1 an.
Question : Votre dernier fou-rire ?
JLM : Il y a quelques jours, lorsque j’ai dit à Justine : »Il ne faut pas parler comme ça. C’est un gros mot ». Elle m’a répondu : « C’est quoi un petit mot alors ? ».
Question : La dernière fois que vous avez pleuré ?
JLM : L’été dernier à l’enterrement de mon voisin, un vieux paysan que je considérais comme mon grand-père de substitution. C’est un gros chagrin qui m’habite encore »
Question : Quel est le principal trait de votre caractère ?
JLM : L’inconstance, l’impatience, l’instabilité.
Question : Et celui dont vous êtes le moins fier ?
JLM : Je m’emporte facilement. La vie moderne ne me va pas. J’aurais été à l’aise à l’époque du Far-West.
Question : La chanson que vous sifflez sous la douche ?
JLM : Le dernier disque de PJ HARVEY. Une merveille.
Question : Votre truc contre le stress ?
JLM : L’écriture. J’écris au moins 3 heures par jour.
Question : Votre boisson préférée ?
JLM : Le justine. Je l’ai inventé spécialement pour le baptême de ma fille. C’est à base d’anis pur. En gros, tu en bois entre quatre ou cinq, et tu perds connaissance.
Question : Qu’avez-vous réussi de mieux dans votre vie ?
JLM : Mes histoires d’amour qui se sont toutes terminées. Quand j’y repense, j’ai le sentiment que le meilleur de l’autre et le meilleur de moi-même se sont exprimés.
Question : Que possédez-vous de plus cher ?
JLM : Les penchants de mon coeur.
Question : Votre film culte ?
JLM : La prisonnière du désert de John FORD.
Question : Votre acteur (ou actrice) préféré ?
JLM : John WAYNE.
Question : Votre héros dans la vie ?
JLM : Bonaparte. C’est pour celà que je m’appelle MURAT. L’homme à cheval qui part de rien. Je suis un guerrier frustré.
Question : Vos écrivains préférés ?
JLM : PROUST. Je suis un inconditionnel.
Question : Le talent que vous aimeriez avoir ?
JLM : Avoir plus de mémoire. Quand j’entends DYLAN dire : « J’entends une chanson une fois, je me souviens à vie des paroles et de la musique ». Je trouve ça fabuleux.
Question : De quoi avez-vous peur ?
JLM : De la mort. Elle m’obsède depuis que je suis enfant. J’ai peur de ne pas être prêt au moment de mourir.
Question : Votre mot préféré ?
JLM : Concupiscent. J’éprouve un infini plaisir à le dire.
Question : La phrase qui vous déstabilise ?
JLM : Je ne vous aime plus.
Question : Que détestez-vous par dessus tout ?
JLM : Le monde actuel. Je n’aime pas cette démocratie qui se transforme en tyranie des imbéciles. Cela fait de moi un antidémocrate.
Question : Petit que vouliez-vous faire ?
JLM : Je souhaitais être un conquistador, un cow-boy …
Question : Quel est le prochain rêve que vous voudriez réaliser ?
JLM : Etre un bon père. C’est être un exemple tout en n’étant pas exemplaire.
Question : Votre prochain lieu de vacances ?
JLM : Chez moi en Auvergne. Laure ma femme ne veut pas que je parte. Les vacances loin de la maison, c’est le début des hostilités.
Question : Qu’est-ce que vous aimez que l’on dise de vous ?
JLM : Il a gagné Austerlitz à lui tout seul (grand éclat de rire). Je suis Napoléonien en diable. Appelez-moi Julien SOREL.
Question : Quelles sont les femmes de votre vie ?
JLM : (long silence) Ma mère. Oui, ma mère.
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Le 30 mars 2008, Michel TROADEC, chroniqueur au journal « Ouest-France »présente « Tristan » à ses lecteurs :
« Ce nouvel opus suit celui consacré à BAUDELAIRE. MURAT déclare : « A force de cotoyer ce niveau de langue, il m’est sorti cette fois quelque chose d’intemporel ». Le journaliste poursuit sa chronique : « C’est une langue d’hier qu’il emploie dans ses nouvelles chansons, ce qui donne à la fois un petit parfum suranné et beaucoup d’élégance ». Il précise : « Ce disque ne chante que l’amour. Un amour « en fuite ». Un amour de « voyageurs perdus ». Car l’amour des deux héros de légende ne s’est pas bien terminé. Il y a bien la douce « Chante bonheur » qui illumine un peu ce paysage de brume, mais c’est parce qu’elle a été écrite en pensant à sa fille« . Michel TROADEC termine son billet ainsi : « L’auvergnat a joué seul, guitare basse, batteries, claviers et saxophone« . Murat enchaîne : « J’avais prévu d’aller enregistrer en Irlande, mais avec la fin de mon précédent label, je me suis moi aussi adapté à la crise. Je ne suis pas une pleureuse de show-biz« .
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« PINKUSHION » le 11 avril 2008, nous délivre une critique qui a le don de me réjouir. Je vous la livre donc : « Murat se contente juste d’être un emmerdeur de haute volée. Un artisan bougon à la plume magique ».
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Alain BRUNET pour « Arts et spectacles »procède à l’interview du Brenoï le 12 avril 2008. Une question et la réponse qui suit ont retenu mon attention :
Question : Comment situez-vous « Tristan » dans cette imposante discographie ?
JLM : Je préfère le prochain. Je n’aime pas me retourner.
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Pour « La Dernière Heure » Belge Isabelle MONNARTle 12 avril 2008 parle « amour »avec Jean-Louis MURAT :
Question : L’histoire de Tristan, l’amour sous ces formes là, vous habite depuis longtemps ?
JLM : Je pense que l’amour est une maladie. Enfin, celui que je chante. C’est une addiction. La sexualité est une technique … mais l’amour vécu comme une maladie commence avec Tristan. On a eu la libido façonnée pour ça. Que l’on prenne n’importe quelle série à la télé, n’importe quelle chanson, c’est toujours comme ça que l’amour est abordé. L’adultère aussi. Toutes choses que je connais bien … Je me suis toujours senti très proche de Tristan. Je suis une victime de l’époque.
Question : Vous en voulez beaucoup à Yseult ? Tout ça est aussi un peu de sa faute …
JLM : Elle c’est une salope. C’est elle qui mène la danse. les femmes font le malheur des hommes, et le malheur des hommes irrigue la poésie. Mais Yseult est très fascinante, attirante, mais quelle source d’emmerdements …
Question : Cet album n’est donc pas le 1er volet d’un diptyque ?
JLM : Yseult est déjà en creux. je ne suis pas tendre avec les filles.
Question : ça ne vous est pas égal de penser que les filles ne vont peut-être pas apprécier ?
JLM : Elles aiment bien je pense. Elles aiment les salopards de mon genre (rires).
Question : Vous parlez pas mal de sexe avec des mots qui, pour certains ne l’évoquent peut-être pas, c’est un jeu ?
JLM : Je prends de plus en plus de distance, parce mes enfants – notamment ma fille Justine – écoutent mes chansons. Quand elle m’a demandé ce que c’est qu’un « muscle doux » je me suis dit qu’il fallait que je donne vraiment dans la métaphore …
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Dans le journal « M la musique » on peut lire cette critique : « Tristan est aussi beau que triste« .
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Pour « Le Soir Belge » le journaliste Thierry COLJON interroge MURAT sur le succès « confidentiel » de sa musique. L’Auvergnat lui répond : « Je fais de la musique pour dans un siècle. C’est ma façon de penser à la postérité. Le succès n’apporte que des troubles ».
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Dans les « Inrockuptibles » le 30 avril 2008Marc BESSE nous livre une critique remarquable …
« Un jour, MURAT ne fera plus de disques, il ne postera même plus de chansons sur le net. Ce jour là, on s’apercevra à quel point on aimait ses livraisons bisannuelles, ses chansons sans prétention, sitôt nées, sitôt enregistrées dans son studio-tanière au milieu des volcans endormis. Et puis, on relira l’ensemble de l’oeuvre. Arrivé à Tristan, on en aura encore le souffle coupé, l’épine dorsale tressaillie. Et on hurlera au génie de Millevaches. L’histoire de MURAT, on la racontera alors aux prosélytes en prenant ce 24ème album comme la pierre angulaire du répertoire. On célébrera l’audace du dernier héritier des trouvères (Tel est pris/La légende dorée), le cabotinage classieux de l’ultime desperado d’un country bluesée à la française (Les voyageurs perdus). La légende parlera de ce mec tout seul, jouant de tous les instruments, refilant ses maladies d’amour aux cordes qu’il gratte, aux cuivres qu’il expire et aux peaux qu’il caresse. Pour l’affaire, il aura mené un dernier duel avec son saxo, sa 1ère muse à la gorge grave qu’il avait abandonnée depuis des caisses pour entrer de vieux vagissements séminaux dans la plus grande élégance roxymusicienne (Marlène). Ces 11 chansons resteront à vie comme celles qu’il a réalisées en solitaire, en osant enfin tout faire lui-même, devant le miroir, comme la première oeuvre de son apogée, la dernière avant une inexorable suite de répétitions de lui-même. Et puis, il y aura cette poésie, que l’on, comparera aux acrobaties de RONSARD bien plus qu’au romantisme trash de BAUDELAIRE : un indélébile savoir-vivre de la langue, en prolongement filial avec la courtoisie des auteurs baladins des 14ème et 15ème siècles, qui aura propulsé MURAT dans des paragraphes entiers des manuels de français pour la préparation du bac.
(…)
Ce jour là nous serons en 2050 et MURAT aura presque un siècle. Ultime coquetterie de râleur éternel : il dira dans ses rares interviews qu’il prépare un disque occitan, pour boucler la boucle de sa colossale odyssée et enfin gagner son fauteuil au paradis des troubadours. Et comme d’habitude, on le prendra pour un dingue … un dingue avec plus de 1000 ans d’histoire de la chanson dans ses veines et plus de 100 disques au compteur ».
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Voilà … tout est dit … Fabuleux MURAT … prochain rendez-vous sur la tournée solo qui suit cet album …
Ce nouvel album (CD + DVD) bénéficie d’une production peau de chagrin.
CD + DVD – Scarlett V2 Music n° VVR 1048802 – boîtier cristal – date de sortie le 01 10 2007.
Tracklisting CD : 1 Sépulture – 2 Avec ses vêtements – 3 La fontaine de sang – 4 L’héautontimoroumenos – 5 L’horloge – 6 Le guignon – 7 Le madrigal triste – 8 La cloche fêlée – 9 L’examen de minuit – 10 Bien loin d’ici – 11 Je n’ai pas oublié – 12 A une mendiante rousse.
Tracklisting DVD : 1 Réversibilité – 2 L’héautontimoroumenos – 3 Le guignon – 4 L’examen de minuit – 5 Bien loin d’ici – 6 Avec ses vêtements – 7 Madrigal triste – 8 L’horloge – 9 Je n’ai pas oublié – 10 La cloche fêlée – 11 La fontaine de sang – 12 Sépulture – 13 A une mendiante rousse – 14 Petite.
Coffret livret + CD – Scarlett V2 Music n° VVR1048808 – CD 12 titres + édition « Les fleurs du mal » Gallimard n° ISBN 978207034894-7 Date de sortie le 11 10 2007.
CD hors commerce - Scarlett V2-Acétate – sans n° de référence – mono-titre : « Sépulture » (2’59).
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Il s’agit d’une première pour MURAT qui ne s’est jamais mis dans la position de simple interprète. Sur ce projet il est accompagné de Denis CLAVAIZOLLE – Morgane IMBEAUD du groupe « COCOON » lui donne la réplique. « Je tenais à avoir une voix féminine. Celle de Morgane porte quelque chose de sombre, une sensualité qui aurait intrigué BAUDELAIRE ». Pour les accompagner en studio on retrouve des fidèles : Christophe PIE (batterie) – Alain BONNEFONT (choeurs) ainsi qu’une section rythmique jazz sur « l’horloge » assurée par Stéphane MIKAELIAN et Pascal FANNY.
Comment MURAT aborde ce pari … Chanter BAUDELAIRE sur des musiques de Léo FERRE, tout en restant … MURAT ???
Pour « l’Express » le 11 octobre 2007 il déclare : « J’ai mis longtemps à accepter. Ce qui m’a décidé ? Je ne voulais pas qu’un autre chanteur s’y colle à ma place ». (…) « Ni l’angoisse ni la dévotion cucul ne m’ont traversé l’esprit. Mon cahier des charges était le respect absolu de la ligne mélodique de Léo FERRE et l’assurance que l’on comprenne bien chaque syllabe.Je suis passé par une phase de transition et n’ai enregistré que lorsque je me suis approprié les chansons. Elles étaient tellement devenues miennes qu’il m’est arrivé de changer instinctivement des mots. C’était sans doute aussi une affaire d’égo : à force, BAUDELAIRE devait m’emmerder … Quand j’en ai eu assez de la formule piano-voix, épurée, très belle car marquée par RAVEL et DEBUSSY, qui habille par exemple « La fontaine de sang » ou « L’héautontimoroumenos », j’ai sorti la guitare électrique, l’harmonica et remis « L’horloge » ou « Madrigal triste » à mon goût … ».
Dans un article publié le 18 octobre 2007 dans les colonnes de « Métro » MURAT répond à cette question :
METRO : Quelle à été la plus grande difficulté ?
JLM : « De m’effacer. Etre uniquement interprète. Ça ne m’était jamais arrivé. D’habitude je compose, j’écris mes textes, je produis. Là, je n’ai fait qu’exécuter. C’est très difficile de s’autojuger quand on n’a pas la musique et qu’on n’a pas écrit les textes. Le plus difficile a été de travailler sur les chansons qui sont complètement hors des structures classiques, hors tempo, comme dans « Je n’ai pas oublié », où tout est aléatoire ».
Mais au fait, que pense MURAT du poète BAUDELAIRE ???
La réponse il la donne à « L’Express » dans l’article mentionné précédemment : « Je me retrouve en lui, comme tous les grands poètes, il parle d’amour, de mort, de dégoût de soi, de désenchantement. Pareil à VILON, à RIMBAUD, il s’en va à la luxure en se signant. Le sale côtoie Saint Jean de la Croix. Ma ferveur pour la poésie c’est ça : un cardinal d’amour extrêmement dépravé, EROS avec mauvaise conscience. BAUDELAIRE reste pour moi, le fils de Julien SOREL et de Mathilde, le petit frère d’Emma BOVARY. Il est aussi rebelle qu’eux, est mené par la passion, s’ennuie en France. C’est le dernier poète chantable. MALLARME est inadaptable. ARAGON c’est du sous BEAUDELAIRE. Je déteste PREVERT. Après c’est la dégénérescence, on arrive au néant, à GRAND CORPS MALADE … »
Sous la plume de Michel TROADEC dans le quotidien « Ouest France » le 7 octobre 2007, il est plus explicite encore : « BAUDELAIRE, c’est empoisonné, c’est toxique. (…) C’est l’homme en position d’échec . Un face à face avec les ténèbres. Et c’est la langue la plus admirable de la poésie française. La langue de tous les siècles d’avant, qu’il ramasse pour en faire un sommet indépassable ». Fermez le ban !!!
L’étude de cet album nous donne l’opportunité de nous interroger sur les moeurs de l’époque, sur la bien-pensance. Le quotidien Belge « La Dernière Heure » dans son édition du 11 octobre 2007 nous relate les difficultés rencontrées par BEAUDELAIRE avec la justice de son pays suite à la parution des « Fleurs du Mal » :
« Cent cinquante ans et toujours la même odeur de souffre. Étonnant pour des fleurs. Mais c’est qu’elles sont du mal et que c’est sous la plume du dérangeant Charles BAUDELAIRE qu’elles ont éclos, le 25 juin 1857, chez POULET-MALASSIS, éditeur parisien.Un bouquet de cent, un bouquet de sang, qui parle de spleen, d’idéal, de vins, de révolte, de mort. Et de fleurs aussi. Un livre mal accueilli par la critique, à l’exception de Barbey d’Aurevilly, qui défendra son ami bec et ongles. Mais l’article qui paraît le 5 juillet dans « Le Figaro » met le feu aux poudres et s’il offre une grande notoriété au poète, il l’envoie également devant les Tribunaux ».
« Cinq mois après le retentissant procès de FLAUBERT pour Madame BOVARY, les chefs d’inculpation qui pèsent sur BAUDELAIRE sont les mêmes : immoralité et obscénité. Mais, à l’inverse de Gustave, Charles, lui, est condamné pour « offense à la morale publique … la morale religieuse et aux bonnes moeurs ». Il aura à payer 300 Francs et se verra contraint de supprimer six poèmes. Qui ne tarderont pas à être publiés, à nouveau, en Belgique, en 1864, dans le Parnasse satyrique du dix neuvième siècle. L’écrivain est très affecté par cet échec. Petit à petit il s’enfonce dans la maladie et dans la misère. Il est couvert de dettes et ne peut faire face à ses créanciers. Aussi quand on lui propose une tournée de conférences dans notre pays, il imagine y trouver une porte de sortie. Las ! C’est lors d’une conférence à Namur en 1866, qu’il est frappé par un grave malaise qui le laisse paralysé et aphasique. Muré dans son silence, il mourra à Paris le 31 août 1867. Il repose à côté de sa mère, au cimetière de Montparnasse ».
Cette page d’histoire tournée … revenons au présent. La critique dans son ensemble est élogieuse envers ce nouvel album. Celle formulée par « Froogy’s delight » est nuancée et convient au fan … pas toujours objectif que je suis : « MURAT avait déjà repris joliment « Réversibilité » il y a quelques années. Ici c’est donc tout un album qui fait honneur aux poètes que furent dans leur genre BAUDELAIRE et FERRE. Et MURAT tient sans doute un peu du talent de chacun dans ses mots et dans sa musique. Et il le prouve en faisant siennes ces 12 chansons qui pourraient sortir du répertoire de l’Auvergnat ».
Je ne peux conclure cet article sur « Charles et Léo » sans dire un mot sur l’exceptionnelle qualité du DVD … Chapeau Monsieur MURAT ! Pour le compte de « RFI »le chanteur nous parle des conditions d’enregistrement de ce que je considère comme un joyau. Piano voix … sans public … à la Coopérative de Mai … MURAT raconte : « Ça a été éprouvant. On n’avait pas le droit à l’erreur. Ça a été fait dans l’après-midi : quatorze chansons, chantées trois fois. Je voulais un petit club. Au départ je ne voulais même pas de micro. J’ai chanté sans sono, sans rien, à l’ancienne. On avait une balance naturelle avec Denis. Le DVD, que je n’ai toujours pas vu, est crû et brut, sans aucune retouche ».
***
Comme il est doux de se promener en compagnie de BAUDELAIRE – FERRE et MURAT je vous donne à lire quelques extraits « des Fleurs du Mal » … de Charles BAUDELAIRE …
***
… L’horloge …
Souviens toi que le temps est un joueur avide
Qui gagne sans tricher, à tout coup ! C’est la loi.
Le jour décroît; la nuit augmente; souviens-toi !
Le gouffre a toujours soif; la clepsydre se vide.
***
… A une mendiante rousse …
Blanche fille aux cheveux roux
Dont la robe par ses trous
Laisse voir la pauvreté
Et la beauté
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… Petite …
(Texte de Léo FERRE et non de Charles BAUDELAIRE … )
mais c’est tellement beau que je ne résiste pas au plaisir de rajouter ces quelques vers …
1 songbook avec les 12 chansons de l’album plus deux inédits « Le rêve » et « L’extravagant ». Le tout est accompagné de magnifiques dessins de JLM.
Dans le cadre de la Promo sur le site jlm.com il était possible d’avoir un aperçu des chansons composant ce nouvel opus. Chacun des titres (moins d’une minute) est accompagnée d’une vidéo. L’ensemble est superbe à l’image de cette vidéo où l’on peut voir JLM (je pense) … en magnifique bébé … sur les paroles et la musique de « Caillou » … c’est trop la classe …
Cet ensemble de 12 petits films est remarquable. On y voit défiler tout ce qui a marqué la vie de JLM … de la plus tendre enfance comme ci-dessus … en passant par le marché de « La Bourboule » … des images du groupe « Clara » … du Tour de France … Tout ce qui a … et fait Murat … Pour mémoire c’est JLM qui dit : « IL FAUT AIMER CE QUI NOUS A FAIT » … Je trouve ces paroles d’une puissance phénoménale … Elles se rapprochent davantage de celles d’un philosophe que d’un chanteur ou d’un poète … je finirai ce voyage en « Muratie » et je ne serai pas loin de penser que MURAT est un philosophe au vrai sens du terme …
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« Platine » dans son numéro d’Octobre, sous le plume de « JPP » sous le titre « L’ange reclus » nous met de plein pied dans l’ambiance sombre de cet opus.
JPP : « Taormina » est votre « combientième » disque ? Beaucoup de journalistes semblent vraiment perdus dans votre discographie ?
JLM : On m’a dit que c’était le 22ème …
JPP : Nouvel album et nouvelle maison de disques, puisque vous passez de EMI/VIRGIN à V2. Qu’est-ce que cela change pour vous ?
JLM : Chez V2 je suis mon producteur en licence alors que j’étais artiste « maison » chez VIRGIN. Mais cela ne change pas grand chose pour moi. Car dans ma maison de disque précédente, on me donnait le budget d’enregistrement, je le gérais moi-même et personne ne venait en studio me dire quoi faire. Cela reste pareil aujourd’hui.
JPP : Comment jugez-vous ce nouvel album par rapport aux précédents ?
JLM : J’essaie surtout d’améliorer ce que je fais. Quand je finis un disque, je fais une sorte d’état des lieux de ce qui est réussi et de ce qui l’est moins, et je prends des notes pour essayer d’améliorer le suivant. Je suis comme un ingénieur ou un architecte, j’essaie de déceler les points faibles de la construction. Cela amène de la diversité à mon travail.
JPP : Pour ce nouvel album certains titres existaient-ils depuis longtemps ?
JLM : Oh non, à chaque nouveau disque je repars de zéro, je n’utilise jamais d’anciens titres. Pas de fonds de tiroirs ! Quand j’ai terminé « Taormina », j’ai tout emballé dans un carton, les textes, les maquettes, c’est fermé et classé, et je passe à autre chose.
(…)
JPP : Comment choisissez-vous le 1er single en l’occurrence « Caillou » ?
JLM : A la fin, une fois que le disque est terminé. Pour « Caillou » je ne savais pas trop. Dès le début de ma carrière, j’ai laissé ma maison de disques choisir le 45 tours. Car si vous imposez vous-même et qu’ils ne sont pas d’accord, ils ne le défendront pas bien, ils ne bosseront pas. J’en ai déjà fait l’expérience douloureuse une ou deux fois. Donc là, j’ai laissé Alain ARNAUD et son équipe choisir. Si ça marche je dis : « Bravo les gars » et si ça ne marche pas, c’est leur responsabilité. C’est un conseil à donner à tous les jeunes artistes : « Ne vous mêlez pas du choix du 45 tours ».
(…)
JPP : Celà va faire 30 ans que vous avez débuté dans la musique, avec le groupe CLARA en 1977, le temps qui passe vous pèse-t’il ?
JLM : Comme tout le monde … Pas plus, pas moins. Cela apporte des choses différentes : par exemple, là je suis grand-père et en même temps à nouveau papa. Mais dire que cela apporte de la maturité ou que sais-je, c’est de la foutaise ! Le temps qui passe on ne le sent pas forcément personnellement, mais plutôt par rapport à l’entourage, avec les enfants qui grandissent par exemple. Je me dis davantage « les enfants grandissent », plutôt que « je vieillis ». J’ai hâte que me petite dernière, Justine, qui a deux ans, grandisse, mais je ne me dis pas : « quel âge aurais-je quand elle aura 20 ans ? ». Je pense plutôt à être un papa efficace.
JPP : L’avez-vous été un papa efficace avec les enfants précédents ?
JLM : Oui, oui, très efficace. J’ai eu deux enfants avant Justine. Je suis trois fois papa de trois mamans différentes. Et grand-père maintenant, d’une petite fille adorable de 5 ans, Lisa. Je suis entouré de femmes et ça me va très bien (rires).
JPP : Le thème de la mort revient souvent dans les textes du nouvel album. Est-ce du au temps qui passe ?
JLM : Pas vraiment. C’est plutôt lié à la vie que j’ai la-haut en Auvergne, au milieu des paysans, où il y a plus de morts que de naissances disons … Depuis 15 ans que je vis la-bas, je vois petit à petit un monde disparaître, les voisins mourir ou être malades, les gens céder leurs fermes …
JPP : Il n’y a pas de renouvellement ?
JLM : Non , pas du tout, il n’y a plus de jeunes qui s’installent. Je suis sensible à l’effacement lent, séculier, d’un monde paysan qui est en train de disparaître, à la disparition de gens de 75 ou 80 ans qui parlent patois et ont un caractère qu’on ne trouve plus. On se croirait parfois dans un film dialogué par AUDIARD. C’est plutôt la fin de ce monde là qui me touche et m’inspire. Par exemple, la chanson « Accueille-moi paysage » parle de ça et de la rudesse de la vie dans ces régions. J’ai deux de mes jeunes voisins paysans qui se sont suicidés de façon effroyable, parce qu’ils étaient trop endettés, étranglés par leur banque. L’un s’est jeté dans la fosse à purin, l’autre s’est pendu. Cà me bouleverse et cela fait la sève de mes chansons.
JPP : D’ailleurs « Taormina » a été enregistré en partie chez vous en Auvergne, contrairement par exemple à « Mustango » qui a été fait aux USA ?
JLM : Oui, dans « Taormina » il reste quelques chansons que j’avais travaillées pour un projet de double CD qui n’est pas sorti, et qui s’appelait « Arverne », sur l’Auvergne. J’ai un disque entier de côté sur ce thème, qui parle des hautes terres, des gentianacées … En fait, c’était la première mouture de « Taormina », et au final, il reste sur l’album quelques chansons de ce disque qui verra peut-être le jour plus tard dans son intégralité.
JPP : Etes-vous d’accord pour dire que ce disque est rayonnant musicalement, malgré le côté sombre des textes ?
JLM : Je suis assez adulte pour comprendre que c’est l’ombre qui donne du sens à la lumière. Ca paraît une banalité, mais il arrive un moment dans sa vie d’homme où l’on se rend compte que l’amour, la mort ont leur revers. Etre un homme lucide c’est traiter les deux, la lumière et l’obscurité, le plaisir et l’angoisse … Toutes mes chansons sont réversibles, je pense, comme un message sombre ou lumineux. Je m’attache à avoir ces deux dimenssions, comme en peinture chez REMBRANDT ou DELATOUR par exemple ».
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Chacun sait combien MURAT n’aime pas ces périodes de promo où il faut enchaîner les interviews. De temps en temps cependant, il semble y prendre plaisir. Pour le compte du journal « ISA »le 31 8 2006 MURAT répond avec délectation aux questions parfois coquines … toujours malignes de Florence TRIDEZ :
F.T. : La qualité que vous préférez chez vous ?
JLM : La fidélité.
F.T. : Le défaut que vous détestez chez vous ?
JLM : Mon système nerveux. Je me laisse aller à la colère. Je casse, je pulvérise, je disperse, je ventile !
F.T. : Pourriez-vous vivre sans sexe ?
JLM : Comme je suis un « orgasme addict », j’aurais du mal. Mais je maîtrise le sperme spirituel. C’est pour ça que les filles m’aiment bien, elles sentent le bon coup.
F.T. : Quand vous vous regardez dans le miroir, vous vous dites quoi ?
JLM : Je me dis que je ne vieillis pas vite et que j’aimerais bien vieillir plus rapidement. Les gens font ce qu’ils veulent, mais je suis contre la chirurgie esthétique.
F.T. : Le truc politiquement correct que vous faites systématiquement ?
JLM : Si un fumeur passe à côté de ma fille de deux ans, le mec peut numéroter ses abattis.
F.T. : A part vous, qui aimeriez-vous être ?
JLM : J’aimerais avoir la puissance de souvenir de PROUST et la puissance de pensée de NIETSZCHE.
F.T. : Vous aimeriez être beau comme ?
JLM : DYLAN.
F.T. : Intelligent comme ?
JLM : DYLAN.
F.T. : Doué comme ?
JLM : DYLAN.
F.T. : Comment aimeriez-vous mourir ?
JLM : Ben … j’aimerais pas mourir ! Pourquoi voulez-vous que je meure, vous êtes dégueulasse !
F.T. : Votre devise ?
JLM : Prévoyons le pire, nous ne serons pas surpris.
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Mais revenons à « Taormina » … Manuella GIROUD nous y invite dans son interview pour le compte de « Nouvelliste » dont voici des extraits:
« Je n’ose pas trop le dire, mais je crois que j’ai fait un album sur la mort »
Durant la conception de ce disque MURAT a été entouré de disparitions et a vécu des déceptions amicales. Il déclare :
« C’est aussi terrible, sinon pire, que la déception amoureuse. Parce qu’un ami, par définition, est quelqu’un qui ne vous trahit pas ».
Il est aussi devenu le père d’une petite fille :
« Je me suis dit : tiens, elle me verra mourir, c’est elle qui me fermera les yeux, donc ça me met un peu de gravité. Cette gravité n’est pas de la tristesse, mais savoir qu’on a un destin mortel ».
Sa plus belle victoire dans ce métier ?
« Durer » …
Comment ?
« En évitant soigneusement le succès et en évitant soigneusement l’insuccès, j’essaie de passer par cette porte étroite et je me maintiens vaille que vaille (rires) ! ».
Dieu ?
« Les peuples de Dieu nous cassent les pieds pour parler chastement ».
Lui qui n’a pas la foi juge tout à l’aune de deux principes simples :
« Tu ne tueras point » et « Aimez-vous les uns les autres ». Ce sont deux avancées fondamentales pour l’homme. Face à ceux qui les remettent en question, il faut savoir dans quel camp on se trouve et défendre ce qui nous fait spirituellement ! Je ne connais pas de message plus élevé que ceux là, avec « Tous les hommes naissent libres et égaux » en écho. Dans cette espèce de précipice dans lequel on a l’impression de glisser, ce sont les branches à peu près solides ».
Jean-Louis MURAT de conclure : « Je ne crains pas de réfléchir à ça et de savoir quoi dire aux enfants. Plus le temps passe, plus je me sens responsable en ce sens ».
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Pour « START UP » MURAT répond aux questions de Florence RAJON … un voyage entre la vie et la mort …
F.R. : Le disque est très dépouillé. Jouez-vous du blues à votre façon ?
JLM : C’est mes racines, le blues. J’ai mis beaucoup de guitares.
F.R. : L’avez-vous fait comme les précédents, rapidement ?
JLM : Non, j’ai pris beaucoup plus de temps, pour être un père (sa fille a 2 ans) très présent et sérieux parce que « papa » c’est le job supérieur par excellence. Mais il faut bien gagner sa croûte aussi. Je travaillais quand ma fille faisait la sieste ou la nuit, quand elle dormait.
F.R. : A Bird on a Poire était léger. Taormina est plus sombre : la mort hante beaucoup de chansons …
JLM : Ca, ce sont les circonstances. J’ai eu quelques coups durs cette année. Deux amis très proches sont décédés brutalement d’un accident de moto. Et puis des voisins aussi. Dans la montagne, en Auvergne, il y a beaucoup de personnes âgées. Entre les suicides et les décès ça y va. Les paysans voient tout s’écrouler autour d’eux. Ils sont nés dans les années 30. Quand on voit les photos de leur enfance, on réalise qu’ils ont traversé 10 siècles en une vie et ils ne comprennent plus rien.
F.R. : Vous chantez « maudits, les temps sont maudits » …
JLM : C’est une chanson contre les religieux. c’est très bien que les gens croient, mais qu’ils ne viennent pas emmerder ceux qui n’ont pas la foi. Apparemment l’homme est un animal qui ne peut pas se passer de l’idée de transcendance. Moi, je suis intimement persuadé qu’il y a des choses bien supérieures à moi. Si vous voulez, je me sens croyant en ce sens là. Je mets très facilement un genoux à terre devant la beauté du monde ou la beauté d’une fille ».
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Autre interview choisie celle de « Magic » (septembre 2006) … Franck VERGEADE est aux manettes :
F.V. : Avec le recul, quels étaient les points faibles de « Mockba » ?
JLM : J’ai fait une erreur. J’avais un mini-album de Faces B destiné au net, intitulé « Les Faubourgs de Moscou« , et j’ai eu la faiblesse de le faire écouter à mon label, qui a insisté pour inclure quelques unes de ces chansons à Mockba. Parallèlement il y avait cet album à part entière pour Pierre Jean DE BERANGER. Du coup je me suis retrouvé avec deux disques qui ne devaient pas sortir dans le commerce, ce qui m’embêtait vraiment. Alors j’ai choisi de mettre deux, trois inédits, ainsi que trois titres de BERANGER. Au final, l’étrangeté de Mockba a ainsi été diluée. Peut-être le sortirai-je un jour comme il aurait du être.
F.V. : Est-ce du au fait d’avoir enregistré à la maison que Laure chante à plusieurs reprises sur l’album ?
JLM : En partie. Elle chante bien mieux que beaucoup de chanteurs que j’ai pu utiliser par le passé. Et surtout, elle enregistre tout en une seule prise ».
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Pour conclure, j’ai une nouvelle fois choisi « CHORUS « (n°57) … Jean THEFAINE interroge JLM sur le froid qui existe entre lui et Fred JIMENEZ :
« Ça s’est corsé entre nous au mois de Novembre, lorsqu’il m’a annoncé, alors qu’on avait fait les rythmiques de dix chansons sur douze, qu’il devait s’occuper de l’album solo qu’il était en train de préparer. Il m’a dit qu’il viendrait achever plus tard le travail, mais je n’ai pas trouvé très cool qu’il me laisse en plan comme ça. Je l’ai donc assez mal pris et j’ai fini le disque tout seul, en jouant moi-même à la basse sur Taormina et L’heure du berger, un ami de Clermont, Christophe PIE, complétant à la batterie et aux percussions ».
Concernant l’ambiance générale « sombre » de l’album, MURAT confie à THEFAINE :
« C’est le reflet de l’année difficile que j’ai vécue …Le non renouvellement de contrat Virgin … mon différend avec Fred JIMENEZ …le lâchage de plusieurs de mes amis … mais surtout la soudaine disparition de deux êtres chers qui se sont bêtement tués en moto, la nuit. Jean-François était un de mes anciens musiciens et Alexandra la meilleure copine de Laure en Auvergne … Plusieurs agressions physiques … à St Malo … dans le hall d’une gare … à l’Elysée Montmartre à un concert de John SPENCER … »
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Taormina ??? Une voyage entre ombre et lumière … entre la vie et la mort … un bel album qui nous donne à mieux connaître l’homme MURAT … et non l’amoureux transi … Être papa … voilà qui, dans le monde d’aujourd’hui vous donne des responsabilités. J’ai pris beaucoup de plaisir a effectuer ce voyage en … « Muratie » … Je vous souhaite bonne lecture.
« 1451″est un ouvrage de 94 pages achevé d’imprimer en Italie en Février 2005 – édition limitée à 1000 exemplaires numérotés – n° ISBN : 2-9520607-1-1. – Scarlett éditions – Orcival. Y est joint :
1 DVD vidéo « 1451″ – 1ère partie du poème & chanson « 1451″ (38′) – mention échantillon gratuit interdit à la vente. Pas de n° de référence
1 CD audio « 1451″ – seconde partie du poème (25′) – mention échantillon gratuit interdit à la vente. Pas de n° de référence.
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Sur le site « Le Monde.Fr » le 16 mars 2005, Stéphane DAVET signe un article qui a pour titre : « Jean Louis MURAT – Ma véritable ambition c’est l’écriture, pas le chant ». Il interroge MURAT sur « 1451″ …
S.D. : 1451 est le 1er ouvrage de poésie que vous publiez.
JLM : J’ai écrit ce poème de 1000 vers l’été dernier, tous les matins en essayant de ne pas basculer dans le chant. J’écris de la poésie depuis que je suis enfant. J’ai commencé à écrire pour draguer. Mon erreur a sans doute été ensuite de croire que la chanson était de la poésie chantée. Avec BERANGER j’ai compris que ce n’était pas le cas. Il refusait d’être appelé poète un peu comme GAINSBOURG, qui revendiquait la chanson comme « art mineur ». Quand CHATEAUBRIAND a proposé BERANGER à l’Académie Française, celui-ci a refusé en disant : « Je ne suis pas poète, je suis chansonnier ».
Pour « Livres-hebdo » le 21 mars 2005 Jean-Claude PERRIER signe un papier qui aborde les projets d’édition de Jean-Louis MURAT. Dans un 1er temps il évoque l’exemple du CD « Madame DESHOULIERES » pour lequel la presse s’était enthousiasmé en raison de l’originalité du projet. Bilan final 45000 exemplaires vendus. Ce qui est un beau chiffre … pour un album dont le moins que l’on puisse dire est qu’il sort des sentiers battus.
Je laisse la parole à Jean-Claude PERRIER qui, concernant le projet « 1451″ écrit :
« En 2003 Jean-Louis MURAT a décidé d’aller plus loin et de créer sa propre maison, SCARLETT éditions, afin de faire quelque chose d’extrême (…) « des livres qui renouvellent le genre » Il a commencé par « Le dragon à 100 visages », un recueil d’autoportraits photographiques. (…) Plus ambitieux, il publie aujourd’hui « 1451″, fac-similé d’une poésie de 1000 vers, écrit, illustré, lu et joué par lui. Un CD et un DVD accompagnent le livre, un album format A4 à la présentation soignée ».
« Ce sont mes amis d’Allia, de vrais professionnels qui m’aident pour la conception graphique de mes livres … sinon je fais tout moi-même à la maison. J’ai un seuil de rentabilité assez bas … chaque livre doit amortir le suivant. J’ai décidé de vendre « 1451″ à la sortie des concerts. Je fais des livres pour les fans, les happy few … » confie MURAT au journaliste. Ce dernier poursuit : « On aurait tort de voir dans Scarlett éditions et 1451 un caprice de star. Jean Louis MURAT qui ne hiérarchise pas les moyens d’expression, écrit tous les matins, très tôt de la poésie qui constitue de la matière première pour ses chansons » (…) MURAT reprend la parole : « J’écris beaucoup mais pour moi. En faire un livre serait de la dispersion. Et utiliser ma notoriété de chanteur pour vendre des bouquins, pas question ! » Et le journaliste de conclure : « MURAT devrait donc continuer à s’auto-éditer. Parviendra-t’il un jour à publier sa version de la prose du Transsibérien de CENDRARS, dit par Jean-Louis TRINTIGNANT et mis en musique par lui, qui dort depuis 10 ans dans les tiroirs de la maison de disques ? ».
Pour clore le sujet, je reprends in-extenso une chronique de Stéphane DESCHAMPS parue le 23 mars 2005 dans les « Inrockuptibles » ayant pour seul et unique thème le recueil de poèmes « 1451″ :
« On dit parfois d’un père de famille nombreuse qu’il se reproduit comme un lapin. Depuis quelques années, Jean-Louis MURAT enchaîne les albums et les tournées, avec une vigueur de lapin chantant. Ces jours ci, il sort Mockba (…) et publie un poème de 1000 vers titré « 1451″, à la fois illustré, récité et mis en images. En image au singulier, parce que c’est un plan fixe et un projet vraiment singulier. La caméra filme l’aube dans la vallée d’Auvergne, le lent passage de la nuit au matin. Dans la pénombre apparaissent, passent et paissent quelques vaches paresseuses. Quand, subitement, un grand lapin blanc entre dans le champ. Il porte des lunettes de ski et fait bouger ses oreilles. On pense à la fois à Gummo et aux Télétubbies ces deux chefs-d’oeuvre de poésie contemporaine avac lapin. On pense aussi à Chantal GOYA à cause du matin et du lapin. On pense enfin à FAULKNER et à John LEE HOOKER, pour cette façon purement sensuelle qu’a MURAT de confondre l’art et la nature. La lapin c’est sans doute MURAT lui même, déguisé mais pas dégrisé. En voix off, il ne clapit point mais se lance dans la récitation langoureuse de son poème de 1000 vers, comme s’il creusait un terrier dans un marécage. Dans la vie des gens normaux, la parole n’est souvent qu’un compromis entre la pensée et le chant. Jean-Louis MURAT qui est différent, fait de la sculpture sur mots. Des mots il fait des mottes. Du verbe, de la glaise. MURAT dit des mots vieux et beaux, d’anciens mots de tous les jours qu’il fait vivre maintenant. Ses mots fondent, dégouttent, se désagrègent pour devenir chanson dans la dernière minute de ce film qui en dure une quarantaine. A la fin MURAT enlève son déguisement, le soleil brûle l’écran, les oiseaux chantent aussi, les vaches n’ont pas peur. Nous, on se frotte les yeux. A cause du soleil et parce que tout ça ressemble idéalement au rêve qu’on aurait fait si on avait dormi dehors, si on était des vaches ».
Pour effectuer des recherches sur MURAT, notamment dans la presse écrite force est de constater que les journalistes qui consacrent des articles à l’Auvergnat ont souvent du talent. C’est indéniablement le cas pour Stéphane DESCHAMPS. Merci à lui … ainsi qu’à ses confrères.
De ces 1000 vers je retire ceux-ci :
« Je ne supporte plus la folle ronde
Des insomniaques qui veulent rafistoler le monde
Le flot baveux de ces corneilles
Dieu m’en garde – comme d’un feu »
Jean Louis MURAT … notre lapin se veut moraliste et il est bien pessimiste … Au sortir de Mockba/1829/1451 … trois projets qui sont liés … je perçois combien MURAT n’est pas qu’un chanteur … poète de l’impossible … celui d’ouvrir les yeux de ses concitoyens …. dans une époque où tout n’est qu’esbrouffe et faux-semblants … Allez courage … Nous sommes le 3 janvier … nous reprenons tous « le cours ordinaire » … de nos vies.
3 titres de BERANGER sont inclus sur l’album » Moscou » ce n’est pas assez pour le prolixe MURAT qui adapte 12 textes du chansonnier pour nous donner à entendre … 1829 …
CD Labels/Emi n° 47450129 – boîtier cristal – (date de sortie le 30 05 2005) – 11 titres
Tracklisting : 1 Liberté (2’16) – 2 Le cinq mai (3’48) – 3 Le mort vivant (2’52) – 4 Ma République (2’44) – 5 La chatte (1’52) – 6 Waterloo (2’41) – 7 La fortune (2’19) – 8 A ma filleule (1’55) – 9 Le peuple musulman (3’23) – 10 Les souvenirs du peuple – 11 La petite fée (4’04).
CD promo Labels/Emi n° 87383722 – pochette cartonnée – hors commerce – mêmes visuel et mêmes titres que sur le CD commerce.
Pas de single.
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Sur le site de « Libération.Fr » le 14 mars 2005, sous la plume d’ Antoine de BAECQUE ont peut lire cet article fort intéressant qui nous explique le pourquoi et le comment de cet album hors norme :
« Allongé sur son lit défait, une guitare à portée de main, le prince Murat reçoit en chambre. Vingt-cinq nouvelles chansons, en deux albums, Moscou et 1829, dont quinze écrites par Pierre Jean Béranger il y a deux siècles. C’est du chansonnier le plus célèbre du XIXe, qui chanta les louanges de l’Empereur, de la femme et de la Liberté, que l’auteur de Lilith nous entretient.
A.D.B. : Béranger : une vieillerie pour profs d’histoire ?
JLM : Il n’y a rien de plus révolutionnaire, de plus porteur ! Aujourd’hui, j’ai cherché aussi bien, je n’ai pas trouvé… J’avais fait la même chose avec Madame Deshoulières, il y a quelques années. Et je n’ai pas fini mes recherches : le Caveau de la République, les chansonniers de la fin du XVIIIe siècle. Je vais aux puces, je farfouille. Béranger, ce fut de la poésie interdite il y a deux siècles, c’est aujourd’hui de la poésie oubliée. Mais ça reste de la poésie : Hugo, Goethe, Stendhal, le considéraient comme un des plus grands, Chateaubriand lui a proposé l’Académie française. Il les a envoyés bouler. J’ai pris conscience de cette gloire en lisant Pouchkine qui, à la fin des années 1820, prédit que «le siècle sera celui de Béranger». J’ai retrouvé ses recueils de chansons, réédités par Perrotin jusque dans les années 1860, et j’ai puisé dedans.
A.D.B. : Son rôle historique ?
JLM : Il le dit lui-même : «J’ai épousé la fille de joie, la fille du peuple, pour la rendre digne des salons de l’aristocratie»… Béranger est celui qui fait d’un art mineur une fierté nationale, c’est le Gainsbourg du XIXe. Avant d’être l’un des hommes les plus aimés et célèbres de son temps, c’est un bohème, un dandy. Pour lui, l’aristocratie n’est pas un titre, ni une apparence, mais une élection de l’esprit. Et surtout un antidote contre la culture bourgeoise.
A.D.B. : Il a aussi un rôle politique.
JLM : Il représente un idéal d’autodidacte, admirablement porté : la liberté, ça s’apprend, ça se conquiert. Celui qui veut, peut : Béranger incarne cette possibilité de monter par la liberté, monter par les mots dans la société et dans la culture. Ça me touche, moi qui aurais dû être un ouvrier. Je peux comprendre Béranger, car je suis aussi une victoire de ce système républicain, qu’il a représenté et défendu. C’est le contraire d’aujourd’hui, les 35 heures par exemple. Le mec qui bosse trop, on le condamne. La République de Béranger, c’est celle du travail : il bosse fort et il chante cela.
A.D.B. : C’est aussi un martyr…
JLM : Ses chansons grivoises sont pourtant d’une gentillesse extrême. Mais la Bacchante, ça vaut trois mois de taule, c’est le tarif. Pourtant, c’est la prison qui le rend célèbre. La presse joue un grand rôle : elle publie les chansons interdites et en fait un héros. Les écrivains viennent alors à son secours ; des banquiers, comme Casimir Périer et Laffite, l’ont à la bonne. Mais il ne leur demande rien, pas un centime. Il refusera même le ministère de l’Education quand on le lui proposera en 1830. Il avait mis une condition à son acceptation, assez géniale : qu’on distribue ses chansons à toutes les jeunes filles de France. Seul un migraineux qui a pris la foudre peut avoir une idée comme ça ! Sa calvitie vient de la migraine. De ce côté-là, on ne se ressemble pas. Béranger n’a pas vraiment le look romantique, c’est un saint républicain.
A.D.B. : Il est surtout connu pour avoir chanté la gloire de l’Empereur…
JLM : Là-dessus, j’ai blindé l’affaire, et j’ai lu Furet : «La légende napoléonienne est la forme la plus simple et la plus populaire sous laquelle la Révolution continue de hanter le pays.» Je trouve ça juste : Béranger déteste le pouvoir, n’aime pas tant Napoléon lui-même, mais il a besoin d’une légende. C’est par sa légende que l’Empire devient la continuation de la Révolution de 1789, une planche pour passer le ruisseau des monarchies. Béranger déteste deux choses : l’alliance des rois et des curés d’une part, les nostalgiques de la Terreur d’autre part.
C’est un libertaire : les rois l’ennuient, les curés l’exaspèrent, les rêves de Terreur peuvent tuer son idéal. Et il a vécu dans la peur de l’invasion étrangère : il a vu les Cosaques camper rue de Rivoli… Napoléon représente pour lui le corps de la nation, c’est un rempart à sa peur. Tandis que le frangin, Lucien Bonaparte, le sort de la misère en lui donnant un salaire de l’Institut. Béranger est l’un des premiers poètes à vivre de sa plume.
A.D.B. : Zélé napoléonien ?
JLM : Je suis un Murat tout de même ! Un Murat du peuple. Donc un fan de l’épopée napoléonienne. Enfant, j’habitais à Murat(le Quaire), un piton rocheux du Massif central, je voulais être Murat ou rien, ce fils d’aubergiste, mauvais garçon, qui devient le prince de l’Empereur, et je me suis choisi son nom… Il finit bien, fusillé avec grandeur, rêvassant sur une image de Pauline. Au combat, c’était Keith Richards, Elton John et Marilyn réunis, chargeant suivi de vingt cantines de fringues. Il se changeait plusieurs fois par jour sur le champ de bataille. Un jour, les troupes russes l’ont applaudi…
A.D.B. : Et la musique pour ces mots-là ?
JLM : Des musicologues ont reconstitué les mélodies de Béranger, mais je n’ai pas écouté ça. Je le chante à l’instinct, comme si j’étais ébéniste : démonter une commode du XIXe pour savoir comment Béranger travaillait la langue; c’est de l’espionnage industriel. Ce qui m’intéresse, c’est le niveau de langue, et je vais le chanter comme si c’était de moi. Je ne vais pas faire de l’histoire de la chanson, c’est plutôt une lutte d’ego : le mien contre le sien ! Je me dis alors que je devrai être très populaire. Car on est proches, sur les thèmes et sur la langue. Cherchez l’erreur … Aujourd’hui, pour devenir populaire, il faut laisser de côté le meilleur de soi, alors que Béranger a rencontré le public avec le meilleur de lui-même.
A.D.B. : Pourquoi ?
JLM : Sans doute que l’Histoire s’est arrêtée. Du temps de Béranger, l’Histoire en marche chantait ses poèmes, alors que pour nous, il n’y a plus d’Histoire. Béranger chantait les oppositions entre Lamartine et Hugo, on va pas faire ça aujourd’hui sur Hollande et Emmanuelli ! Béranger nous dit pourquoi il est quasi impossible d’être un chanteur populaire travaillant en français aujourd’hui. Lui, il avait le corps de Napoléon comme corpus, nous, c’est fini… Le dernier corps, ce fut de Gaulle, et la dernière grande chanson populaire, c’est Sardou : Ne m’appelez plus jamais France… On vit dans une crise de l’Histoire qui a provoqué une catastrophe de la langue. »
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Un article du « Monde » daté du 16 mars 2005 nous donne des informations complémentaires :
Question : De quand remonte votre rencontre avec l’oeuvre de ce chansonnier du 19ème siècle ?
JLM : Il y a cinq ans, je suis tombé sur une lettre de POUCHKINE, qui à la fin des années 1820, s’étonnait de constater qu’en France la star des lettres était plus BERANGER que Victor HUGO. J’ai plongé dans son oeuvre, sa biographie. Je lisais ses textes, une guitare à mes côtés, quand un truc m’inspirait, je composais. J’ai un côté prof frustré. Celà me plaît de faire découvrir celà aux gens, comme je l’avais fait avec Madame Deshoulières.
Question : Qu’est-ce qui vous touche chez Pierre Jean DE BERANGER ?
JLM : Sa simplicité, son amour de la langue, sa volonté de ne pas être esclave de sa notoriété. Sa façon aussi de faire de la chanson populaire en fixant des idéaux républicains.
Question : Les deux thèmes principaux sont l’amour libertin et la politique. Vous même êtes souvent inspiré par le premier, moins par le second ?
JLM : En France la liberté d’expression me paraît moins garantie qu’en 1830, les mythes de la « bien-pensance » étaient moins nombreux au temps de BERANGER. Quand une chanson grivoise comme « La bacchante » l’envoie en prison, les journeaux de toute l’Europe reproduisent le texte de la chanson le jour du procès. Ses chansons politiques n’étaient pas incriminées. Aujourd’hui on peut se mettre à poil, mais bien d’autres sujets sont tabous. En entretien avec des journalistes, comme en chanson, je sais qu’il y a des thèmes que je ne peux pas aborder sous peine de me faire dézinguer par une censure sans visage« .
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Poète, chansonnier PJ DE BERANGER est connu pour ses citations … En quelques mots les défauts de la Société, les travers de l’homme sont plantés – Voici quelques exemples découverts dans le Littré :
Trinquer est un plaisr fort sage Qu’aujourd’hui on traite d’abus.
Viens mon chien, viens ma pauvre bête, mange malgré mon désespoir.
D’un bout du monde à l’autre l’habit fait tout.
Où l’ambition règne, la gaieté perd son coin.
Des distances l’amour peut rire, l’amitié n’en supporte point.
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Le 19 mars 2005 Murat déclare à Olivier HORNER pour le compte du journal suisse « Le Temps : « Béranger c’était l’essence de l’impertience et de ce que devait être la chanson Française. Ce n’est plus le cas ».
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Ci joint un lien qui vous permettra de mieux découvrir ce poète chansonnier … j’ai nommé : Jean-Pierre DE BERANGER …