- 95 – Jean-Louis MURAT … et le regard des autres …

En 1993, dans les colonnes de « Femme actuelle » France MOSCONI interpelle MURAT : « Avez toujours peur du regard des autres ? ». L’Auvergnat répond : « Plus que jamais ! C’est tout le paradoxe des activités artistiques : vouloir rester caché tout en se montrant, avoir envie de se taire tout en parlant, être connu tout en essayant de rester en retrait« .

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Quel dilemme en effet … Toujours en 1993, contre son gré (à ce qu’il dit) MURAT se lance dans sa première tournée. Dans les colonnes de « L’Est Républicain » le 1er décembre 1993,  Alain DUSART nous rend compte du concert donné par MURAT salle « Poirel » à Nancy : « Jeans, sweet ample et barbe naissante, ce jeune homme traîne sa quarantaine juvénile en creusant son microsillon en marge de la variété. Dans sa ferme du Massif Central, sa tanière, la soupe s’accomode de croûtons aillés, pas de chansons. Jean-Louis MURAT s’avance, hagard, comme surpris d’être là. Il scrute les premiers rangs et démarre dans la brume des projecteurs. Dès les premières notes, le public se laisse transporter par sa musique d’errances joyeuses, comme une escapade vers un cottage Irlandais ou dans la crépusculaire fraîcheur des volcans Auvergnats ». (…) « MURAT hésite. Anxieux. Sa main parcourt sa chevelure à rebrousse poils. Il se ronge un ongle et explique : « J’ai chaud, j’ai soif » (…) « J’ai la trouille pour les trois premières chansons ». Le journaliste poursuit : « Tourments partagés … Souffle léger, vapeur translucide, il enchaîne avec de nouvelles chansons ». (…) « MURAT dévoile avec pudeur les gerçures de sa vie. Avec une sublime mélancolie, comme une confidence, il décrit des fractures où s’engouffrent l’amour, des gestes incompris ».

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Le 8 novembre 1993 le chantre Auvergnat est en concert à Vichy. « R.B.C. » pour le journal local « La Montagne » nous donne ses impressions : « Sorte de seigneur sans royaume – par choix – cet être décalé qui oscille entre le moine guerrier et le chevalier poète, est sorti de son donjon pour conquérir un peuple qui l’adorait sans le connaître ».

Le 15 novembre 1993 Arnaud VERNET pour « La Montagne » écrit : « Le personnage est avare de gestes, de sourires et de regards ».

Le 16 novembre 1993 pour « Le Monde » Véronique MORTAIGNE, un soir de première recueille les confidences de MURAT : « Les gens dans la salle, je n’ose pas les regarder » (…) « Je ferme les yeux, je me sens comme un type bourré qui étale sa vie au bistrot et qui tout à coup, a un éclair de lucidité il se dit : oh la la, je les ennuie. Qu’est-ce que je les ennuie ! ».

Le 9 novembre 1993 Gilles RENAULT pour « Libération » titille MURAT : « Cette insatisfaction chronique ne participe t’elle pas à la longue, d’un complexe d’échec ? ». La question est rude, la réponse sera franche : « C’est vrai que j’ai le sentiment de perdre mon temps, de trouver tout mal … Cette impression qu’enregistrer des disques n’est pas ce qui va m’apaiser. Comme si je n’avais pas encore trouvé ma voie. Ca fait un peu chic de dire ça, par rapport à tous ceux qui rament, mais … le fait est que je ne me sens ni musicien, ni chanteur, ni même artiste ». 

Dans les chansons écrites par Jean-Louis BERGHEAUD que chante MURAT, l’auteur n’est jamais tendre envers lui même. Qui aime bien châtie bien dit-on. Lorsqu’il s’agit de parler de lui, BERGHEAUD n’est pas avare de mots aigres-doux ou même d’avanies.  Lisons le ou écoutons le …

… Paradis perdus …

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Extrait de ‘Cheyenne Autumn » (1989) 

(…)

« J’ai une vie de chien

Dans le règne animal ».

(…)

***

… L’ange déchu …

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Extrait de « Cheyenne Autumn » (1989)

(…)

« Quand s’éveille l’ange

Dans mon pauvre corps« 

(…)

***

… Le venin …

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Extrait de  « Cheyenne Autumn » (1989)

(…)

« Je regarde mon corps de porcelaine

Et je reste un jouet du temps ».

(….)

***

… Ma demeure c’est le feu …

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Face B du « Col de la Croix Morand » (1991)

(…)

« Dans ma vie de harpon

Sans signification »

(…)

***

… La fin du parcours …

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Extrait de « Vénus » (1993)

(…)

« Rongé, je me sens esquinté« 

(…)

« Et le corps trahit cheveux, dents, un souci ».

(…)

***

… Jeune pluie sur le chardon …

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Extrait de « Murat live » (1995)

(…)

« Je ne sais plus chanter

Comme ce chanteur à la con ».

(…)

***

… Corridor humide …

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Extrait de « Murat live » (1995)

(…)

« Qui sous le masque saint

De nos premières années

Comme un laquais, un chien

Je n’ose le penser »

(…)

***

… Verseau …

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Extrait de « Murat live » (1995)

(…)

« Puis ce fut, tu m’as déçue

Tu n’as rien tenu de tes promesses

Tu n’est qu’un connard

Tu m’as eue, j’ai perdu tant de temps

Aujourd’hui, je n’ai plus d’espoir ».

(…)

*** 

… Fort Alamo …

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Extrait de « Dolores » (1996)

(…)

« De ma vie vulgaire« 

(…)

« Je ne vaux plus le coup »

(…)

« Je vis dans la crasse, je suis dégueulasse« 

(…)

***

… Le môme éternel …

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Extrait de « Dolores » (1996)

(…)

« Sans toi, je ne vaux plus rien ».

(…)

***

… Nu dans la crevasse …

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Extrait de « Mustango » (1999)

(…)

« Cette pluie qui cingle sur ma carlingue« 

(…)

« Je ne veux plus être

Ce pin sylvestre

Ce fond de saint doux »

(…)

« Hier à la poste

J’avais une mine atroce »

***

… Le fier amant de la terre …

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Extrait de « Mustango » (1999)

« Je suis du peuple nu qui se déchire en toi »

(…)

« Moi le fumier du monde où tu veux te planter ».

***

… La surnage dans les tourbillons d’un steamer …

AU DELA

Extrait du CD Maxi « L’au-delà » (2002)

(…)

« Je m’abîme dans des remords de merde

Je suis bâti de centres et de chimères.

Je baigne dans mon sang,

C’est ma sombre splendeur.

Je suis l’amant et l’ennemi de l’amant »

(…)

***

… Foulard rouge …

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Extrait de « Mockba » (2005)

(…)

« Pauvre con« 

(…)

***

… Billy …

Extrait de « Taormina » (2006)

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(…)

« Tu sais tu me dégoûtes Billy

Tu n’est vraiment qu’un con Billy« 

(…)

***

… Les rouges souliers …

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Extrait de « Grand lièvre » (2011)

(…)

« S’éloigne le canoë

De notre gourbis privé« .

(…)

***

Salut à toi « Billy » … merci Jean-Louis MURAT … Pour ceux qui ne le sauraient pas « Billy » et « Jean-Louis » sont la même personne … Il n’y a pas pire juge sur MURAT que lui-même …

***

Le 13 octobre 2014 « Babel » est dans les bacs. MURAT nous parle surtout de Jean-Louis BERGHEAUD enfant. Il évoque peu sa vision d’homme, si ce n’est par bribes …

… Blues du cygne …

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Extrait de « Babel » (2014)

(…)

« Avancent dans la vie/Entravés« 

(…)

Le terme « entravés » est employé au pluriel. Sans doute que Jean-Louis BERGHEAUD se l’attribue à lui même. De quelles entraves parle t’il ? Lui seul le sait. Et si la réponse se trouvait dans cette interrogation en toute fin de chanson  : « Pourquoi chanter maman ? » Suivie de cette réponse laconique : « ça je ne sais ! »

***

… Les ronces …

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Extrait de « Babel » (2014).

(…)

« Je ne veux plus chanter/J’ai chanté trop abondamment« .

(…)

***

… Vallée des merveilles …

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Extrait de « Babel » (2014).

(…)

« Tu te nuis tout le jour

Et chaque nuit tu vis

Comme un porc

Au goutte à goutte.

C’est quoi tu dis ?

Ah, tu fais du sport ! ».

(…)  

Rarement MURAT a parlé avec autant de dérision de lui même. « Tu te nuis le jour » « tu vis comme un porc » …  Comble de la moquerie cette réponse futile : « Tu fais du sport » … comme tous les bobos Parisiens …  tous   ces « bons à rien »« fils à papa »

***

Ajout le 18 septembre 2016 …

… French lynx …

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Extrait de « Morituri » (2016).

(…)

« Tu rumines au sextant/Tu te crois indigène/Mais tout est éboulis ».

(…)

***

… « J’ai eu le cafard » …

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Extrait de « Morituri » (2016).

(…)

« Où en es tu donc/De tes âneries ».

(…)

Le dernier album de MURAT j’ai nommé « Morituri » n’est pas le plus optimiste. MURAT y parle peu de lui. Il parle de nous, du monde de fous dans lequel nous vivons, j’allais dire … mourons. En interview il déclame que : « Il n’y a plus rien à chanter »… Ce ne sont pas les mots exacts mais ça y ressemble. Je crois qu’il a raison. MURAT a souvent raison avant tout le monde. Pour une fois je ne m’en réjouis pas.

***

Publié dans : ||le 31 août, 2014 |3 Commentaires »

3 Commentaires Commenter.

  1. le 31 août, 2014 à 22:01 Flo Réal écrit:

    Didier, merci d’avoir traité ce sujet délicat et paradoxal (peut-être en apparence, seulement ?…)je l’avais évoqué en son temps sur mon blog également à l’adresse suivante :
    http://sur-les-traces-de-jean-louis-murat.over-blog.com/2014/02/lilith-le-fascinus-la-fascination-le-narcissisme-primaire-8.html
    Bises confraternelles ;)

    Répondre

  2. le 1 septembre, 2014 à 17:09 Rhiannon écrit:

    Délicat comme sujet…ce paradoxe significatif chez Murat…il tend souvent le bâton pour se faire battre…une façon peut être de dire »mais « malgré cela…m’aimerez-vous encore? Il prétend désormais préférer qu’on ne l’aime pas..pas certaine…

    Répondre

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