- 32 – Jean-Louis MURAT et Pierre DUPONT … poète et chansonnnier …
Pierre DUPONT est né à Lyon le 23 avril 1821, son père est forgeron. Sa mère décède, il n’a que 4 ans. Son père se remarie et confie la garde de l’enfant à son parrain qui est curé de son état. C’est donc cet abbé qui le place chez les religieux, il n’a que 9 ans ! Mais, n’ayant pas la vocation il revient dans sa famille à Lyon.
A 20 ans il rejoint la famille de ses grands parents paternels à Provins. Ouvrier dans une filature puis employé de banque il vient vivre à Paris où il fréquente les goguettes. Il y rencontre Victor-HUGO. Puis il lie amitié avec NERVAL – BAUDELAIRE - Théophile GAUTIER et Charles GOUNOD. Il publie un 1er livre. Il obtient un poste à la rédaction du dictionnaire de l’Académie Française de 1842 à 1847.
La maison de Saint Brice …
En 1842, le poète et chansonnier vient passer quelques mois chez ses grands-parents qui ont une belle maison à St Brice dans le département de la Seine et Marne. Il y affermit son désir d’être poète et y compose ses chansons rustiques, inspirées par Provins et son histoire. Il quitte Saint-Brice pour faire son service militaire, mais revient y séjourner à plusieurs reprises. Ce bâtiment, entouré d’un parc, abrite de nos jours la mairie.
C’est avec le concours de Charles GOUNOD que Pierre DUPONT il écrit la chanson « Les boeufs ».
Républicain, il compose en 1846 le chant des ouvriers. Il fait également paraître un recueil « Le chant des paysans » hostile au futur Napoléon III. Il participe aux barricades du faubourg St Antoine le 2 décembre 1851 ce qui lui vaut d’être condamné à sept ans de déportation.
Dans un rapport de police le concernant il est écrit : « Chansonnier, 26 boulevard Beaumarchais. Sans antécédent judiciaire. Démagogue exalté, dangereux, fait partie de toutes les réunions , de tous les clubs, de tous les comités de propagande. Délégué au conclave rouge. Figurait dans tous les banquets des démocrates socialistes. Exerçait une influence fâcheuse sur les ouvriers. En relations suivies avec tous les meneurs, dont il partageait les espérances ».
Il s’enfuit en Savoie. Son épouse, qu’il appelle « Jeanne » dans ses chansons, meurt précocement. Il noie son chagrin dans l’alcool. Il mourra à Lyon, quasiment oublié le 24 juillet 1870.
Pierre DUPONT jeune …
… Les Boeufs …
« J’ai deux grands boeufs dans mon étable,
Deux grands boeufs blancs marqués de roux.
La charrue est en bois d’érable
L’aiguillon en branche de houx.
C’est par leur soin qu’on voit la plaine
Verte l’hiver, jaune l’été.
Ils gagnent dans une semaine
Plus d’argent qu’ils n’en ont coûté ».
« S’il me fallait les vendre
J’aimerais mieux me pendre ;
J’aime Jeanne ma femme, eh bien ! J’aimerais mieux
La voir mourir, que voir mourir mes boeufs ».
« Les voyez vous, les belles bêtes
Creuser profond et tracer droit
Bravant la pluie et les tempêtes
Qu’il fasse chaud, qu’il fasse froid
Lorsque je fais halte pour boire,
Un brouillard sort de leurs naseaux,
Et je vois sur leur corne noire
Se poser les petits oiseaux ».
« S’il me fallait les vendre
J’aimerais mieux me pendre
J’aime Jeanne ma femme, eh bien ! J’aimerais mieux
La voir mourir, que voir mourir mes boeufs ».
« Ils sont forts comme un pressoir d’huile,
Ils sont doux comme des moutons.
Tous les ans, ont vient de la ville
Les marchander dans nos cantons,
Pour les mener aux Tuileries,
Au mardi-gras devant le Roi,
Et puis les vendre aux boucheries
Je ne veux pas, ils sont à moi ».
« S’il me fallait les vendre
J’aimerais mieux me pendre,
J’aime Jeanne ma femme, eh bien ! J’aimerais mieux
La voir mourir, que voir mourir mes boeufs ».
« Quand notre fille sera grande,
Si le fils de notre régent
En mariage la demande
Je lui promets tout mon argent,
Mais si pour dot il veut qu’on donne
Les grands boeufs blancs marqués de roux,
Ma fille, laissons la couronne
Et ramenons les boeufs chez nous ».
« S’il me fallait les vendre
J’aimerais mieux, me pendre
J’aime Jeanne ma femme, eh bien ! J’aimerais mieux
La voir mourir, que de voir mourir mes boeufs ».
Epreuve de 1880 (contrecollée sur papier carton) signée CARJAT …
Quel rapport me direz-vous entre Pierre DUPONT ce chansonnier « oublié par tous » et Jean-Louis MURAT le poète Auvergnat ? Tout comme pour BERANGER le Brenoï voue une réelle admiration pour ce poète chantre de la cause paysanne et ouvrière. Un article du journal « Libération » de l’année 2006 signé Ludovic PERRIN fait état d’un projet d’album « autour de Pierre DUPONT ami de BAUDELAIRE … sur le même mode que les hommages à BERANGER ou Madame DESHOULIERES »
Pas plus tard que le 9 juillet, je reçois un message d’un « ami bien intentionné » (si si j’en ai … y compris en Muratie) qui me fait savoir que j’ai oublié dans la liste des inédits un titre : « J’ai deux grands boeufs dans mon étable ». Cet inédit a été offert par MURAT au vainqueur d’un concours organisé sur son site internet … celui des vaches. le raccourci est vite fait … Je me trompe peut-être mais je ne pense pas. Cela ressemble tellement à MURAT … Le titre qu’il donne n’est pas celui du poème qui s’intitule : « Les boeufs » … Celui fourni par lui est l’intégralité de la 1ère ligne du poème … Pour « Bon anniversaire mamie mamie » il avait opéré de façon assez similaire puisque le département indiqué par Murat était la Haute Vienne alors qu’il s’agissait en définitive de la Charente Maritime … Cela ne facilitait pas les recherches. Dans le cas présent son admiration pour Pierre DUPONT est avérée et déclarée même si c’est de manière sibylline.
Je vous rassure tout de suite je ne suis pas l’heureux élu de ce cadeau … Ce titre a également été chanté par Marcel AMONT (1962) …
Faute de pouvoir vous mettre à disposition la version de Jean-Louis MURAT … je vous offre celle champêtre de Guylène LAUR chanteuse Auvergnate …
Autre CD à titre unique « Vous les femmes » pastiche de Julio IGLESIAS également offert par MURAT au gagnant d’un jeu organisé sur son site internet. A la différence prêt que MURAT a chanté cet inédit à une ou deux occasions dont un concert RTL en 2000 (titre non diffusé à l’antenne). J’ai trace de ce titre dans un concert parisien … mais c’est plus une mauvaise imitation qu’une chanson …
Mais revenons à Pierre DUPONT … On raconte qu’encore jeune, il se rendit chez Victor-Hugo. Ce dernier absent, il lui laissa sa carte sur laquelle il crayonna les vers suivants …
» Si tu voyais une anémone
Languissante et près de mourir,
Te demande comme une aumône,
Une goutte d’eau pour fleurir,
Si tu voyais une hirondelle
Un jour d’hiver te supplier
A la vitre battre de l’aile
Demander place à ton foyer
L’hirondelle aurait sa retraite,
L’anémone sa goutte d’eau !
Pour toi, que ne suis-je, ô Poète,
Ou l’humble fleur ou l’humble oiseau ».
Aux yeux de la postérité … (mais est-ce vrai puisqu’il est tombé dans l’oubli ???) … Pierre DUPONT est l’auteur d’une chanson chantée sur les barricades dès 1848 …
… Le chant des ouvriers …
« Nous dont la lampe le matin
Au clairon du coq se rallume,
Nous tous qu’un salaire incertain
Ramène avant l’aube à l’enclume
Nous qui des bras, des pieds, des mains,
De tout le corps luttons sans cesse,
Sans abriter nos lendemains
Contre le froid et la vieillesse ».
(…)
« Nos bras sans relâche tendus,
Aux flots jaloux, au sol avare
Ravissent leurs trésors perdus,
Ce qui nourrit et ce qui pare :
Perles, diamants et métaux,
Fruits du coteau, grains de la plaine ;
Pauvres moutons, quels bons manteaux
Il se tisse avec notre laine ».
(…)
« Mal vêtus, logés dans des trous,
Sous les combles, dans les décombres
Nous vivons avec les hiboux,
Et les larrons amis des ombres,
Cependant notre sang vermeil
Coule impétueux dans nos veines
Nous nous plairons au grand soleil
Et sous les rameaux verts des chênes »
(…)
Merci à MURAT de nous avoir permis de découvrir ce talent « de notre langue » oublié … Pierre DUPONT.
***
et merci à toi de transmettre à ton tour; du coup j’ai mis un commentaire sur la vidéo de la chanson interprétée par Guylène Laur, afin de redonner à Pierre Dupont ce qui lui appartient.
Merci Armelle.
Je ne comprends trop ce qu’il faut que je fasse.
Didier.
Dernière publication sur : Jean-Louis MURAT ... il aime ... il n'aime pas ...