Archive pour octobre, 2011

Jean-Louis MURAT … « Grand lièvre » … 2011 …

Jean-Louis MURAT  ...

Après deux années d’attente, le 26 septembre 2011 « Grand lièvre » est dans les bacs. Beaucoup de critiques, des plus avertis, parlant de cet album, disent que : « jamais MURAT  ne s’est autant ouvert sur le monde ». Cela est vrai. Mais ce qui l’est plus encore c’est de constater que : « jamais il n’a été autant chercher au plus profond de lui même » … les mots, les idées, les références de ses chansons nouvelles.

Une lecture attentive de ce nouvel opus (ce qui est loin d’être le cas de tous les journalistes … ) permet d’affirmer que MURAT  porte cet album en lui depuis des années. En 1989, lors de la sortie de « Cheyenne », répondant aux questions de Christian FEVRET on s’aperçoit qu’il porte en lui : « la cassure » … dans laquelle s’est engouffré ce « grand lièvre ».  Ecoutons le  …

« Je suis d’origine auvergnate. Depuis des siècles ma famille est la-bas, je me suis attaché à la terre. Je me sens bien dans les paysages ». (…) « Je me sens bien au milieu de ces gens là, de la manière dont ils peuvent parler de l’âme humaine ou de la terre ». (…) « En faisant des chansons, » (…) « je me suis rendu compte que ce sont toujours les rêves de l’enfance qui m’alimentent dans ma vie d’adulte, et mon pays est toujours dans mes rêves d’enfance ». (…) « J’ai l’impression de ne vivre qu’avec la mémoire. Pas de vivre dans le passé, mais de vivre dans le présent avec la mémoire. Aimer la mémoire au présent, c’est quelque chose de dynamique. La mienne celle qui me nourrit, s’est terminée vers 13 – 14 ans. J’ai eu une enfance tellement particulière, par laquelle j’ai été tellement marqué, que ça s’est arrêté là ». (…) « Mon grand-père était un homme du Moyen-Âge, avec toutes les qualités du Moyen-Âge et sans les défauts du XXième siècle ».     

Dans une autre interview de 1989 il déclare à Jean-Marc THEVENET : « Je suis presque exclusivement un nostalgique mais attention un nostalgique dynamique. J’ai toujours un oeil dans le rétro. Dans le présent je me noie et l’avenir c’est abstrait, ça n’existe pas. Je voudrais savoir d’où je viens ». (…) « Il faut sans cesse passer par la mémoire, » (…) « cela ressemble à nos chemins en Auvergne, la mémoire c’est tortueux ». (…) « Je crains le souffle du temps sur moi »  …

Mais revenons à l’interview accordée à C. FEVRET à qui il parle de ses espoirs : « Moi j’espère vendre pas mal de disques, mais l’une de mes motivations essentielles est de passer mon diplôme agricole, de racheter une ferme et de refaire le lien avec ce que j’ai vécu dans l’enfance. C’est une idée fixe chez moi. Refaire le paysan, reprendre les choses où mon grand-père les a laissées. je me sens issu du monde paysan, la cassure a été faite par mon père comme par beaucoup de types de sa génération, c’est à dire que dans les années 50, ils auraient pu continuer à faire le paysan, reprendre les fermes ou les boulots de leurs parents. Mais ils ont été attirés par la ville ou bien se sont trouvés à travailler différemment. Il y a donc un maillon manquant dans cette filiation strictement paysanne, qui est la génération de mon père. Et j’ai envie de refaire le lien, c’est évident« .

Petite parenthèse … « Le lien défait »… ça vous dit rien ??? Je pense que dans ce titre il y a un peu, de ce dont nous parle Murat plus haut !!!

Ce préambule nous a mené jusque « Cheyenne Autumn »… « Cheyenne » ???  mais bien sûr … « les indiens » … John WAYNE  … et maintent « Grand lièvre »???  Réminiscence des légendes indiennes ??? Conte pour enfants ??? Qu’importe … MURAT n’a t-il pas dit (ce ne sont pas les mots exacts) : « On fait toujours la même chanson … Il n’y a que les mots qui changent ». C’est sûrement vrai, le contexte n’est plus le même … les sentiments ne sont plus là,  où vont vers d’autres …

Dans le cadre de la Promo pour « Var Matin »le 9 octobre 2011 MURAT évoque l’enregistrement de cet album effectué à … St Paul de Vence … « Ça me rappelle des souvenirs, parce que c’est là que j’avais enregistré « Cheyenne Autumn » … Vous voyez … on y revient. Connaissant la personnalité de MURAT … il y a là toute une symbolique qui n’est pas gratuite.

Mais plus de vingt ans ont passé … MURAT est l’heureux papa de JUSTINE et GASPARD. Il a un boulot à plein temps, celui d’être papa … L’avenir ??? C’est déjà « demain » … ce n’est pas … « loin » et surtout c’est … « court »  … c’est plein … d’incertitudes … Le « Grand lièvre »porte en lui tous les souvenirs de l’enfant BERGHEAUD  et toutes les inquiétudes du papa MURAT. On y retrouve les silences et les leçons de vie de François (le grand-père) … Nous effleurent ces images où Jean Louis aide EMILE  (le voisin) à rentrer les vaches, à soigner les boeufs à discuter de rien, à discuter de peu, à écouter le vent, à entendre chanter la pluie … FRANCOIS  et EMILE  ne sont plus … Jean-Louis les aimait tant … jusqu’à son dernier souffle ils seront ses compagnons … ceux à qui l’on peut tout dire … à qui il n’est rien besoin de dire pour qu’immédiatement la réponse vienne …

Ce « Grand lièvre »résonne aussi des flonflons de la fanfare municipale où, en compagnie de son père, de copains de son âge, le p’tit BERGHEAUD participait aux défilés du 11 novembre ou du 14 juillet. Tout le monde se retrouvait au bistrot du coin, pour parler de ceux qui avaient fait la guerre (14-18) ou acte de résistance (39-45) … « Pitié pour le cheval » et « Rémi » trouvent davantage leur raison d’être dans ces souvenirs que dans l’apologie de la guerre ou d’un patriotisme quelconque.

Le contexte a changé … les paysans se sont fait rares du côté des montagnes d’Orcival. Les tracteurs ont remplacé le cheval … la moissonneuse batteuse la lieuse … les prairies se sont couvertes de genêt … les dettes ont pris la place d’économies chichement mises de côté … L’eau et l’électricité ont apporté un peu plus de confort. Mais les têtes se sont faites lourdes. La télévision aux repas du midi et du soir a remplacé les silences. On se parle moins qu’avant …  et à présent …  les silences ne sont que doutes et incertitudes, gravité et désespoir. « X »… s’est mis la corde au cou … « Y »… s’est jeté dans la fosse à purin. Les technocrates pullulent tandis que les paysans sont de moins en moins nombreux. MURAT ne s’est jamais détourné de ses valeurs paysannes. Certains disent de lui que c’est un « dandy paysan » un « bobo »Non … on ne peut pas tromper EMILE  comme ça ! Jean-Louis BERGHEAUD  … vous savez, « celui qui passe à la télé de temps en temps » … plus brocardé par ses congénères que montré en exemple … le « Jean-Louis » se rend toujours au bistrot du coin pour y parler du prix de la viande, du temps qui passe, de ceux qui ne sont plus … Ce BERGHEAUD là … il n’a pas changé d’un iota … c’est celui que l’on retrouve en filigrane tout au long de ce « Grand lièvre ». C’est en parlant avec ces paysans qu’il s’est convertit à des idées plus terre à terre … des idées faites de bon sens … Certains ont même dit qu’il était « réac » … Quelle bande de nigauds … ces gens partisans de la « pensée unique » … 

Pour « Var Matin » MURAT  précise : « Grand lièvre, au départ, c’était le titre d’une chanson ». (…) « On ne l’a pas enregistrée, mais je trouvais que ça collait toujours bien au projet : la nature, les choses en voie de disparition … ». Dans le même article il assène : « C’est un disque sur la perte et l’échec ». (…) « Les textes sont inspirés par la lente transformation du paysage rural dans lequel je vis, la crise et l’Europe qui se défait. Ma génération aura vécu la montée de la construction Européenne et sa chute probable ».

Adrien TOFFOLET  pour « Evene.fr »  écrit : « Grand lièvre à l’opposé de l’album précédent, est un disque français, à l’écriture poétique et pointue, par moments politique mais sans être partisane. MURAT  y oppose les styles de vie et valeurs des campagnes. « Haut Arverne » et « Vendre les prés » dans lesquelles le chanteur dépeint « un monde moderne et son cul plein de boue/accusant la montagne d’être obstacle à la joie ». Il s’agit d’un manifeste pour la simplicité … du mode de vie et des musiques ».

Les textes de cet album dévoilent une écriture simple mais fournie. MURAT emploie 2209 mots pour 798 mots différents. Ce n’est pas rien. Vous prenez les chansons une à une … jamais un mot ne fait doublon … c’est un travail remarquable. Les générations futures rendront grâce à MURAT  de cette qualité  …    http://didierlebras2.unblog.fr/3-dictionnaire-muratien-grand-lievre-2011/

Pour « L’Echo Républicain » du 10 octobre 2011 MURAT  répond aux questions de Rémi BONNET :    

R.B.  : Les nouvelles technologies nous proposent toujours du neuf …

JLM : Il y a une boulimie de ça, et ça nous pète à la gueule. On est entouré de gens qui sont enfermés dans des bulles spéculatives de leur propre vie. On est dans une fuite en avant, comme si l’ancien monde ne représentait plus rien.

R.B. : Avez-vous conscience d’avoir créé une oeuvre ?

JLM : C’est vrai que les disques commencent à s’accumuler, mais je préfère ne pas y penser. Plus j’avance et plus je pense au futur. Mon prochain disque est déjà prêt. Je vois tellement de transformations dans la société que ça m’inspire énormément. Notre époque est terrifiante, on arrive à un état de décomposition où on ne sait plus où donner de la chanson. 

Thierry GANDILLOT pour le compte du journal « Les Echos » interviewe l’Auvergnat qui lui confie : « Chez les indiens d’Amérique du Nord, le lièvre, architecte de l’univers, est un esprit farceur, sauvage et libre comme l’air. Rétif à toute domestication ». (…) « Grand lièvre » ???  « Le sens je m’en fous un peu. J’aime surtout la graphie de ce titre, sa sonorité. A l’oreille, en bouche, ça se tient. Je pratique une poésie instinctive, je n’aime pas la poésie pensée. Le rap c’est la mise à mort de la poésie, ce qu’il y a de plus bête dans l’art poétique, le mécanisme mis à nue de façon simpliste ». 

Répondant aux questions de Patrice DEMAILLY (25 septembre 2011) pour le compte de « Nord Eclair » MURAT  explique les raisons qui ont motivé le choix de ce titre : « C’était un titre provisoire. Qui est devenu définitif. On ne sait jamais comment les appeler. le lièvre, c’est aussi une espèce en voie de disparition ». Le journaliste lui rétorque : « Comme vous ? » Ce à quoi il répond : « En tant que chanteur absolument. La chanson Française est, elle aussi, une spécialité en voie de disparition. Ce n’est pas une extinction mais une lente transformation. Elle devient du folklore. C’est son danger. Tous les nouveaux groupes chantent en anglais ».

P.D. : Sur ce disque vous donnez l’impression d’être en paix avec votre voix ?

JLM : Peut-être qu’avec le temps je commence à chanter comme il faut … Mais c’est vrai que je suis libéré avec le chant. Avant, j’étais dans des stratégies de dissimulation ».   

Les 10 chansons de cet album (onze avec l’inédit) recèlent de phrases qui révèlent tout les talents d’écriture de MURAT. Le single « Les rouges souliers » présenté comme chanson à rythme, sans ambition, à la lecture se révèle être une …  »bien belle chanson » …

 

(…)

« Etre amoureux de Toi

Pour qu’on s’occupe de Moi.

Les choses à vivre ici

N’ont jamais goût de paradis ».

(…)

« Toute éponge gorgée d’eau

Se croit la forme du beau.

Je pense à cette idée bleue

Je vole dans la nuit des Dieux ».

(…)

 

 L’inédit « Ne t’attends qu’à toi seul » comporte une phrase superbe …

 

(…)

« La fente du volet

Est une vaste plaine »

(…)

 

 

… pour qui sait ouvrir les yeux … regarder le monde …

Pendant des années, à la sortie  des disques de Jean-Louis MURAT l’apanage de la plus belle interview ou chronique revenait à Jean THEFAINE. Le Rennais a rangé ses crayons. Pour la sortie du « Grand lièvre » c’est sans conteste un autre journaliste Breton qui (selon moi) remporte la palme. Il s’agit de Michel TROADEC. Ce dernier, le dimanche 2 octobre 2011 dans la rubrique culturelle « Ouest France » écrivait parlant de ce nouvel opus et de son interprète : « Une nouvelle fois,  il chante merveilleusement la condition humaine, en poète rural, amoureux et inquiet ». TROADEC va jusqu’à poser la seule question qui vaille : « A-t’on jamais écrit ainsi dans la chanson Française ? ». Il répond sans ambage : « Pas au niveau de notoriété de jean-Louis MURAT« . Il poursuit : « Ecouter MURAT  c’est goûter au plaisir de la phrase, de la poésie chantée ». (…) « Ecouter MURAT c’est se laisser bercer par le verbe, quitte à ne pas tout comprendre ». Ces mots n’ont que plus de valeur quand on sait que ce journaliste tout comme THEFAINE  n’est inféodé par aucun « appareil » … Il ne « roule pour personne ».

 

***

 

Le « Grand lièvre » bénéficie d’une production classique comportant :

  • CD boîtier plastique « Scarlett V2″ n° 2775290 doté de 10 titres : (Qu’est-ce que ça veut dire ? (6’48) - 2  Sans pitié pour le cheval (3’39) -  3   Rémi est mort ainsi (4’46) - 4   Alexandrie (6’34) –   Haut Arverne  (5’46)  – Je voudrais me perdre de vue  (5’19)  -  Vendre les prés  (3’40)  - 8  Le champion espagnol  (4’26)  - 9   Les rouges souliers  (3’53)  – 10   La lettre de la pampa (3’57).

 

  • Double CD digipack (cartonné) « Scarlett V2″ n° 2775291 – CD 1 : les 10 titres ci dessus – CD 2 : 8 titres Live Coopé (1  16 heures Qu’est-ce que tu fais ? (7’33) –  2  Chanter est ma façon d’errer – 3  Le train bleu (5’38) – Mousse noire (5’54) – 5  Pauline à cheval (4’21) - 6  Taormina (7’37) – 7  Yes Sir (5’24) – 8  L’examen de minuit (7’07).

 

  • 33 Tours « Scarlett V2″ n° 2779821 avec huit titres.

Face A : 1  Quest-ce que ça veut dire (6’48) - 2  Sans pitié pour le cheval ( 3’39) - Rémi est mort ainsi (4’46) - 4  Vendre les prés (3’40).

Face B : 1  Haut Arverne (5’46) – 2  Je voudrais me perdre de vue (5’19) – 3 Ne ‘attends qu’à toi seul (5’55) – 4  Le champion espagnol (4’26).

 

  • CD Hors commerce    »Scarlett V2″ n° LC 01801/2789255 – monotitre « Les rouges souliers » (3’53).

 

  • CD Promo – compilation « Les Inrockuptibles – Rentrée Août 2011″  n° CD LI 11208 – avec le titre « Les rouges souliers » (3’53).

 

  • 1 carte postale au logo « Grand lièvre » réservée aux abonnées des « Inrockuptibles ».

 

 

  • 1 CD Hors commerce « Scarlett V2″ sans n° interdit à la vente – monotitre « Vendre les prés » (3’40).

 

  • 1 sampler « Scarlett V2″ LC 01801/2786749 – CD à usage promo (interdit à la vente) 3 titres :  1 Vendre les prés – 2 Ne t’attends qu’à toi seul – 3 Tous les chanteurs sont malheureux (Démo) (3’49). Ce CD pochette cartonnée était résevé aux abonnés du journal « Libération » – Tirage : environ 100 ! 

 

  • 1 collector « Les Victoires de la musique 2012″ –   »Scarlett V2″/Polydor n° 0252794397 8 comprenant les 10 titres de la version originale – Edition limitée. (Date de sortie le 24 février 2012).

 

  • A noter l’existence d’une version radio édit du titre « Alexandrie » (4’03) au lieu de (6’34).

 

 

 

***

 

Au final cet album est un beau cadeau que nous fait MURAT. C’est un disque tout en contrastes qui nous permet de voyager de l’Auvergne jusqu’à la « pampa ». C’est une ouverture sur le monde d’aujourd’hui (avec ses problèmes) mais également un renfermement sur soi-même avec des tas d’interrogations qui tiennent à « demain » ??? Le meilleur exemple nous est donné par le titre « Qu’est-ce que ça veut dire ? » MURAT  y mêle le « chaud » et le « froid ». Deux phrases retiennent mon attention :

  • « La vie est une beauté/Merveilleux d’être en vie » … tout en optimisme …

 

  • « Au chapitre de ma vie/Est-ce le dernier voyage ? » …   tout en questionnement …

 A 60 ans vous ne regardez pas l’avenir de la même façon qu’à 20 ans. C’est une banalité que de le dire. C’est autre chose que de le vivre. Inexorablement on s’éloigne d’un « bout » pour se rapprocher de « l’autre ». Les questions sur nous même n’ont guère d’importance. Elles valent pour ceux qu’on aime. Que sera demain ??? MURAT  pense à GASPARD  à JUSTINE … à leur mère. Comment les prémunir de ce « monde qui broie tout … qui ne vaut que par le fric … le paraître » ???  Chacun, à notre niveau, nous aurons à répondre à ces questions. Pas plus que nous, MURAT  n’a les réponses  … Comme tout un chacun  il … « ESPERE »  … Le concernant, il nous dit en forme de clin d’oeil : « Je n’ai pas peur de l’hiver » et signe … « jlm » …

 

 Chapeau Monsieur l’artiste !!!

Carte postale de la tournée « Grand lièvre » …

DSC01858

 

***

 

Publié dans:Non classé |on 13 octobre, 2011 |4 Commentaires »

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